Bilan 2021 : une sélection de livres de science-fiction

Rendez-vous traditionnel de chaque mois de décembre, L’épaule d’Orion vous propose une sélection de livres de science-fiction publiés dans l’année. Comme toujours, cette liste n’a pas pour prétention de sanctionner « le meilleur de la SF », mais de suggérer des lectures parmi les romans que j’ai lus et qui m’ont enthousiasmé. Il s’agit d’un choix personnel, par nature incomplet et subjectif.

L’année fut particulière en terme d’activité éditoriale, notamment en raison d’une situation sanitaire qui n’en finit pas de ne pas finir. Entre les reports de 2020 et les nouveautés de l’année, la rentrée littéraire a été pléthorique. Je n’ai pas lu tous les livres. Si votre roman préféré ne se trouve pas dans cette liste, c’est soit qu’il m’a échappé, soit que vous avez mauvais goût. (Je vous laisse choisir parmi ces deux propositions, je ne veux d’ennuis avec personne.)


Romans

S’il faut élire « le meilleur roman de l’année », pour moi cela ne fait aucun doute, il s’agit de Gnomon de Nick Harkaway qui remporte haut la main L’épaule d’Or 2021. C’est un roman parfait.

Gnomon de Nick Harkaway

Gnomon est une lecture exigeante, qui demandera de votre part un investissement total. Enigme policière à la structure narrative labyrinthique autant que réflexion philosophique sur notre avenir proche, interrogeant nos sociétés de surveillance telle une mise à jour contemporaine de 1984, voilà un roman comme il en existe que très peu et qui offre une expérience de lecture unique en son genre. Ses deux tomes de 480 pages chacun occuperont merveilleusement vos neurones. (Voir les chroniques détaillées du tome 1 et du tome 2)

Gnomon, tome 1et 2 – Nick Harkaway –  Albin Michel Imaginaire – trad. Michelle Charrier – mars 2021 – 2 x 480 pages.


Perhaps the Stars d’Ada Palmer

Il s’agit là de la sortie en VO (anglais US) du chapitre final de la série Terra Ignota d’Ada Palmer qui avait débuté avec la publication de Too like the Lightning en 2016. Ada Palmer nous offre là un final mémorable pour une œuvre magistrale qui restera inscrite dans les mémoires de la science-fiction mondiale. Comme le reste de la série, sa sortie en français sous une traduction de Michèle Charrier (comme Gnomon, tiens donc !) est prévue chez Le Bélial’ en deux tomes, le premier, L’Alphabet des créateurs en février 2022 (et dont le projet de couverture illustre cet article), et le second, Peut-être les étoiles à l’automne. (Voir la chronique sur la VO)

L’Alphabet des Créateurs et Peut-être les étoiles – Ada Palmer– Le Bélial’ – trad. Michèle Charrier – printemps et automne 2022.


La Nuit du Faune de Romain Lucazeau

Autre livre marquant de l’année, La Nuit du Faune n’est pas à proprement parlé un roman de science-fiction mais un conte philosophique qui donne à lire une poésie de l’univers à la manière du Starmaker d’Olaf Stapledon. C’est une quête métaphysique qui replie l’espace et le temps pour interroger le devenir des civilisations. Tropesque ! (Voir la chronique détaillée)

La Nuit du Faune – Roman Lucazeau – Albin Michel Imaginaire – sept. 2001 – 256 pages.


Mentions spéciales : j’ajoute à ces recommandations des sorties qui concernent des textes plus anciens, inédits ou rééditions, qui restent néanmoins fort remarquables. Le surprenant La Monture de Carol Emshwiller, publié chez Argyll sous une traduction de Patrick Dechesne. L’empli d’humanité Au carrefour des étoiles de Clifford D. Simak, publié chez J’ai Lu sous une traduction de Pierre-Paul Durastanti. Le formidable Liens de sang, d’Octavia E. Butler, dans une traduction révisée au Diable Vauvert. Sans oublier la réédition tant attendue d’un des chefs d’œuvre de la science-fiction, Vision aveugle de Peter Watts chez Le Bélial’ sous une traduction remaniée de Gilles Goullet.


Textes courts

Le Livre écorné de ma vie de Lucius Shepard

Le livre écorné de ma vie n’est pas un livre pour tout le monde. Il faudra apprécier de contempler les ténèbres, de se pencher sur l’abîme pour y suivre un narrateur qui s’y perd. Thomas Cradle, l’alter ego de Lucius Shepard dans cette autobiographie imaginaire cruelle et cynique, est un sale type. Passé cette barrière, Le livre écorné de ma vie est un récit d’une grande richesse. Brutal et virtuose. (Voir la chronique détaillée)

Le Livre écorné de ma vie – Lucius Shepard – Le Bélial’, coll. Une Heure Lumière – trad. Jean-Daniel Brèque – juin 2021 – 144 pages


Ring Shout : Cantique rituel de P. Djèlí Clark

L’histoire du roman se déroule aux États-Unis dans les années 20 et raconte le combat acharné de trois femmes afro-américaines contre les monstres du Ku Klux Klan. On parle ici de véritables monstres, de créatures venues d’un autre plan d’existence pour envahir notre monde. La lecture de Ring Shout est en soi une expérience culturelle profonde. C’est un texte intense, immersif, qui raconte beaucoup plus que sa trame scénaristique. (Voir la chronique de la VO)

Ring Shout : Cantique rituel – P. Djèlí Clark – Atalante – trad. Mathilde Montier – oct. 2021 – 176 pages.


Monstrueuse Féérie et Angélus des Ogres de Laurent Pépin

Exploration clinique et poétique de la psyché humaine, Monstrueuse féérie et Angélus des ogres constituent une œuvre littéraire fascinante, chaotique et horrifique, admirablement écrite. Il s’agit d’un de mes coups de cœur de l’année. (Voir la chronique détaillée)

Monstrueuse Féérie et Angélus des Ogres – Laurent Pépin – Flatland, coll. La Tangente – oct. 2020 et oct. 2021 – 2×102 pages.

Collisions par temps calme de Stéphane Beauverger

Une vraie surprise que ce court roman qui explore, sans chercher à mentir, une honnête utopie et la questionne, comme il se doit, de façon subtile, sans tomber dans les panneaux trop communs des fantasmes sur l’IA. L’auteur nous offre là un texte original, à de nombreux points de vue, totalement en décalage avec la production habituelle en science-fiction. (Voir la chronique détaillée)

Collisions par temps calme – Stéphane Beauverger – La Volte, coll. Eutopia – oct. 2021 – 128 pages.


Mentions spéciales : deux autres recommandations avec tout d’abord un texte très particulier, sous la forme d’un monologue qui questionne l’art, Basqu.I.A.t  de Ian Soliane publié chez JOU, ainsi que À dos de crocodile de Greg Egan publié dans la collection Une Heure Lumière chez le Bélial’ qui s’attaque enfin au cycle de L’Amalgame.


Recueil

Friday Black de Nana Kwame Adjei-Brenyah

Recueil de nouvelles à la frontière des genres publié dans l’excellente collection Terres d’Amérique, Friday Black est un puissant recueil qui met l’imaginaire au service du présent. Nana Kwame Adjei-Brenyah est un très grand écrivain. Assurément une de mes meilleures lectures de l’année, tous genres confondus. Lisez Friday Black ! (Voir la chronique détaillée)

Friday Black – Nana Kwame Adjei-Brenyah – Albin Michel, coll. Terres d’Amérique – trad. Stéphane Roques – 272 pages


Fournaise de Livia Llewellyn

Que dire de ce recueil de nouvelles horrifiques, plus terribles les unes que les autres ? Il est magnifiquement écrit, magnifiquement traduit, et absolument traumatisant. C’est une grande œuvre littéraire à ne pas mettre en toutes les mains. (Chronique publiée dans Bifrost n°105)

Fournaise – Livia Llewellyn – Dystopia – trad. Anne-Sylvie Homassel – oct. 2021 – 256 pages.


Bandes dessinées

Macbeth, roi d’Écosse – Tome 2: Le Livre des fantômes – Thomas Day et Guillaume Sorel

Juste magistral ! (Voir la chronique détaillée)


Les bilans des années précédentes : 2018 2019 2020


20 réflexions sur “Bilan 2021 : une sélection de livres de science-fiction

  1. De chouettes reco, qui pour sûr me donne encore plus envie d’avoir le Palmer entre les mains !
    J’ai Fournaise en PàL et Ring Shout en wish, je pense que ce seront plutôt des lectures 2022 pour ma part (peut-être Fournaise ce sera fin d’année)

    Aimé par 1 personne

    1. Fournaise, j’étais obligé de l’inclure dans cette liste ! Mais j’ai un peu peur des retours que vont me faire les gens après l’avoir lu. C’est tellement malaisant comme livre… du genre que tu ne peux pas vraiment admettre en public que tu as aimé le lire. Et pourtant !

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  2. Gnomon est très bien mais il m’a manqué des connaissances pour l apprecier pleinement. Un peu le même problème avec le roman de Romain Lucazeau même si il ma paru plus accessible.

    Reste à tenter Vision aveugle dans la série j’aime mais je ne comprends pas tout…

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    1. Je suis d’accord, le roman de Lucazeau est plus accessible que Gnomon. Gnomon est un labyrinthe en plusieurs dimensions dans lequel il faut beaucoup s’investir pour n’en percevoir qu’une partie. Ce roman me semble infini et j’ai hâte de pouvoir le relire. Quant à Vision Aveugle, je dirais qu’il faut juste se laisser porter par la folie du truc.

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  3. Enfin l’heure des recommandations ! Elles arrivent pile au bon moment avant Noël 😁
    Dans le lot, il faudra que je redonne sa chance à Ada Palmer. Je note le Lucius Shepard et pourquoi pas Macbeth s’il passe l’épreuve du feuillage !

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      1. je n’ai lu que le premier. Il y a plein de chose très originales et intéressantes mais que l’écriture est lourde (à moins que ce soit la traduction) On ne peut pas dire que je déteste mais je n’adore pas. J’hésite un peu à me lancer tout de suite dans les volumineuses suites. On se demande un peu si, comme l’était Balzac elle est payée à la ligne, car il y a vraiment des longueurs.

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