The Expert System’s Brother – Adrian Tchaikovsky

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Si vous lisez régulièrement ce blog, vous savez qu’Adrian Tchaikovsky est un auteur qui y est suivi de près, pour ses œuvres dans le domaine de la fantasy et plus encore pour ses productions en science-fiction. The Expert System’s Brother est le dernier court roman de l’auteur, publié aujourd’hui. C’est un roman qui est  caractéristique de son auteur, que ce soit dans sa forme ou dans son contenu. En fantasy comme en SF, Tchaikovsky reprend des thèmes habituels, ou simplement déjà exploités, se les approprie et les remanie pour en faire des petites merveilles d’originalité quand bien même, dans le fond, on pourrait se dire que c’est du déjà lu. Et c’est là qu’il excelle car, non, ce n’est pas du déjà lu. C’est du Tchaikovsky et c’est unique.

The Expert System’s Brother est précisément cela : un thème bien connu en SF, la conquête d’une planète par l’humanité et les difficultés que l’entreprise inévitablement comporte en termes d’adaptation à un nouveau milieu. Tchaikovsky ne raconte pas l’arrivée des humains sur une planète, mais ce que la société humaine est devenue longtemps après, près de 500 ans, alors que les hommes ont oublié leur origine. Le récit va être l’occasion de la découverte de ces origines.

Au moins dans sa première moitié, The Expert System’s Brother a les apparences d’une science fantasy. La société décrite en est à peu de choses près à l’âge de pierre. Il n’y a pas de technologie, pas d’outils en métal. L’humanité s’organise en petits villages de quelques centaines d’individus, qui vivent d’agriculture et de chasse, repoussant quelques prédateurs ou animaux dangereux dont les descriptions nous indiquent rapidement que nous ne sommes pas sur la Terre que nous connaissons. Mais les choses se font plus étranges encore. Les villages sont organisés de manière symbiotique autour d’arbres gigantesques. Ces arbres abritent aussi un nid de guêpes dont la présence a une importance dans la société humaine qui en dépend. Chaque village possède un homme de loi et un médecin. Ces personnes sont désignées par… les guêpes et reçoivent alors, après s’être fait piqués, un esprit, ghost, qui loge dans leur crâne, tel un parasite, au prix d’une transformation physique douloureuse et défigurante. Ces esprits parlent par la voix de leur hôte auquel ils apportent leur connaissance, en médecine par exemple, ou dictent les lois de la communauté, via l’homme de loi. Celui-ci décide notamment de l’expulsion, synonyme de mort quasi-certaine, des individus jugés impropres à la vie en communauté, que ce soit pour des vols, des violences, ou des délits plus graves. Inutile de préciser que tout ceci n’est pas de la magie mais uniquement l’illustration du principe de Clarke selon lequel toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie.

L’expulsion, severance, de ces individus se fait par le marquage de leur corps par une décoction préparée par le médecin du village. Tchaikovsky montre ici encore sa passion pour le monde des insectes, car ce marquage chimique s’inspire fortement des sociétés organisées de fourmis, par exemple, dans lesquelles les individus se reconnaissent par les phéromones dont ils sont porteurs. Dans le cas de cette société humaine, la severance a des conséquences sociales, mais aussi biologiques. Il devient impossible à l’individu rejeté par la société de se nourrir des aliments habituels. A l’inverse, les animaux dangereux qui occupent les forêts environnantes semblent se désintéresser d’eux. Au passage, mais c’est presque sa spécialité, Tchaikovsky peuple sa planète de tout un bestiaire.

L’histoire du livre débute lors d’une cérémonie de severance. Alors qu’il n’a que 13 ans, Handry va malencontreusement être en partie recouvert de la dite préparation. Sa vie au sein de son village va devenir difficile pour les trois années qui vont suivre, car même s’il n’a commis aucun crime, il est marqué du sceau de l’infamie. Il devra finalement s’enfuir pour survivre, alors même que sa sœur jumelle est désignée docteure du village. C’est au cours de cet exil, qui occupe la seconde moitié du livre,  qu’il rencontrera d’autres parias et qu’il fera la découverte des origines de la société qu’il connait comme étant celle des humains. C’est évidemment cette seconde partie, où se révèlent les mystères de ce monde, qui fait l’intérêt du livre. La première moitié, pas des plus passionnantes, n’est qu’une mise en place pour les thématiques que l’auteur va pouvoir développer par la suite.

Comme je le disais en introduction, même si le thème n’est pas très original, Adrian Tchaikovsky en fait un traitement qui l’est, et apporte une réflexion sociologique sur l’évolution et l’adaptation nécessaire à l’environnement, ainsi que politique sur le pouvoir et le rôle hégémonique de la technologie dans les sociétés. De plus, ce roman est joliment écrit. Si Tchaikovsky a jusqu’ici brillé par ses talents d’écrivain, je trouve qu’il ne fait que s’améliorer avec le temps. Notons toutefois que le titre est à lui seul un énorme spoiler.


D’autres avis de lecteurs : Apophis,   Gromovar, l’Albedo.


Livre: The Expert System’s Brother
Auteur : Adrian Tchaikovsky
Publication : 17 Juillet 2018 chez Tor
Langue : anglais
Nombre de pages : 176
Format : papier et ebook


10 réflexions sur “The Expert System’s Brother – Adrian Tchaikovsky

  1. Et parfois, je trouve bien plus intéressant l’approche d’un thème éculé en SF. Cela permet d’en apprécier les nuances, de remarquer si justement l’auteur s’est habilement exécuté dans cet exercice « créatif » (et intellectuel) et d’éprouver un immense plaisir de lecture quand il s’agit d’une thématique chère à notre cœur de lecteur.
    Ainsi, cela ne me dérange pas – au contraire – qu’AT s’empare de la conquête d’une planète pour mieux l’explorer et offrir un petit bijou.
    Bref, tout cela pour dire que je compte le lire sous peu!

    Aimé par 1 personne

    1. Tu aurais tort de te priver. Je suis d’accord avec toi sur l’exploration d’un thème déjà connu. Ce n’est pas forcément un défaut, et ça peut même être une qualité. Ce n’est pas le meilleur AT, mais c’est tout de même du AT.

      Aimé par 1 personne

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