Schild’s ladder – Greg Egan

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Schild’s Ladder fait partie des romans de Greg Egan qui n’ont pas encore été traduits en Français. Soit que le travail de traduction soit complexe, soit qu’aucun éditeur n’ait à ce jour pris le risque de publier ce livre, dans les deux cas les réserves sont justifiées. C’est un livre que j’ai adoré, mais qu’il est difficile de recommander tant il est difficile d’accès. Sauf sous conditions.

Greg Egan est connu pour écrire des livres de Hard-SF assez ardus, si bien qu’on aime à dire qu’il faut au moins un doctorat en science pour le lire. Sauf que dans le cas de Schild’s Ladder, cette gentille hyperbole est une méchante litote. Pour appréhender Schild’s Ladder, il faut un doctorat en physique. Il faut connaître la théorie de la gravitation quantique à boucles version Carlo Rovelli et Lee Smolin, il faut savoir ce qu’est la décohérence quantique de Heinz-Dieter Zeh, savoir ce qu’est un vecteur d’état, un espace de Hilbert, la géométrie différentielle et la métrique riemanienne, l’invariance de Lorentz….Et il est impossible de s’en passer car c’est le sujet même du roman. Si vous ne maîtrisez pas tout cela un minimum, le livre sera difficile à lire et vous n’arriverez pas au bout des 40 premières pages. Schild’s Ladder s’adresse à un lectorat très ciblé et assez restreint. Si vous faites partie de ce lectorat, alors Schild’s Ladder est un roman fascinant, un tour de force surprenant et un des ouvrages de Greg Egan les plus poussés. Un chef-d’oeuvre en d’autres termes.

In the beginning was a graph, more like diamond than graphite. Every node in this graph was tetravalent: connected by four edges to four other nodes. By a count of edges, the shortest path from any node back to itself was a loop six edges long. Every node belonged to twenty-four such loops, as well as forty-eight loops eight edges long, and four hundred eighty that were ten edges long. The edges had no length or shape, the nodes no position; the graph consisted only of the fact that some nodes were connected to others. This pattern of connections, repeated endlessly, was all there was.

Le roman débute vingt mille ans dans le futur. L’humanité est largement dispersée dans la galaxie, transhumanisée, voire pour certains totalement acorporée, et n’a plus vraiment de contact avec la mort, sauf de manière locale et jamais vraiment définitive. Depuis vingt mille ans, l’état des connaissances en physique n’a pas beaucoup évolué, et toute la compréhension de l’univers repose sur une théorie dite des graphes quantiques (dérivée de la gravitation quantique à boucles). Jusqu’à ce que quelques chercheurs dans un coin isolé de l’espace habité tentent une expérience pour tester les limites de la théorie. (Il s’agit en gros de vérifier qu’il n’existe qu’un vecteur d’état du vide). L’expérience tourne très mal, et déclenche une réaction en chaîne en mettant à jour une superposition d’états quantiques plus stable que le vide. Une immense explosion s’en suit, dont le front se déplace à la moitié de la vitesse de la lumière et engloutit sur son passage étoiles et planètes. Les populations humaines se voient contraintes à l’évacuation forcée des mondes les plus proches. Six cent ans plus tard, une autre équipe de scientifiques s’atèle à comprendre le phénomène en réalisant des expériences en bordure de front pour tenter de comprendre les lois physiques nouvelles. Rapidement deux factions antagonistes se forment. Les Yielders souhaitent pouvoir étudier le plus possible le phénomène, et le comprendre. Les Preservationists veulent le détruire. D’un côté et de l’autre, Tchicaya et son amour d’enfance Mariama vont s’affronter intellectuellement et scientifiquement.

Greg Egan utilise des flashbacks pour construire les personnalités et relier les décisions de chacun à des événements passés. Puis, un jour, une expérience lève un peu le voile et révèle que l’autre côté de la frontière est emplie de vie. Le vide n’est que dans notre univers…Tout le génie d’Egan va être d’imager un monde dans lequel les lois physiques sont radicalement différentes, et où plus aucune interprétation classique n’a de sens.

Dans Schild’s Ladder, l’intrigue avance à travers les discussions entre les différents personnages, ou les séminaires scientifiques à bord de la station. Les actions se résument à des expériences de décohérence quantique à base de pulses de particules. Rien que cela détournera sans doute nombres de lecteurs, en plus de la complexité du propos à base de tenseurs de densité et de vecteurs d’états. Comme à l’accoutumé, le style d’Egan est aride et sans effet. Lorsqu’Egan construit une révélation, il lâche l’information cruciale au détour d’une phrase, lorsqu’il estime que vous devez avoir déjà compris le twist par vous même, sans faire de rond de jambe. Il n’y a pas de cliff hanger chez Egan. Et comme d’habitude, la fin est abrupte.

En conclusion,

Schild’s Ladder est un roman fascinant, génial et illisible.


Livre : Schild’s Ladder
Auteur : Greg Egan
Publication : 2002
Langue : Anglais
Traduction : Non
Nombre de pages : 352
Format: papier et numérique


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