La Millième nuit – Alastair Reynolds

La pause estivale touchant à sa fin, il est temps de se pencher sur les sorties de la rentrée littéraire qui nous promet de belles lectures dans le domaine de la science-fiction.  À commencer par un nouveau titre dans l’illustre collection Une Heure-Lumière – celle des textes courts d’un centaine de pages chez Le Bélial’ – et, qui plus est, un titre fort attendu puisqu’il s’agit de La Millième nuit de l’auteur gallois Alastair Reynolds qui sortira le 25 août 2022. Pourquoi donc cette attente autour de ce titre en particulier ? me demanderas-tu cher lecteur à l’esprit toujours aussi affuté et à qui l’on n’en compte pas sans fournir un minimum de justifications. Et bien parce qu’il s’agit d’Alastair Reynolds, astrophysicien de l’ESA devenu écrivant de hard-SF de premier plan, et qu’il s’agit du texte qui ouvre la porte sur l’univers de son chef d’œuvre, le roman House of Suns, resté inédit en français à ce jour (un troisième texte dans cet univers a été écrit par Alastair Reynolds en 2017, Belladonna Nights). Réjouissons-nous donc, car cette publication chez l’éditeur français qui aime la hard-SF, devrait annoncer la publication prochaine dudit roman. Enfin, on l’espère…

Thousandth Night (titre original) fut initialement publié en 2005, soit cinq ans avant House of Suns. Il ne s’agit pas véritablement d’une préquelle car, quand bien même l’action se situe avant le celle du roman et les personnages principaux sont communs aux deux œuvres, il existe certaines divergences entre ces deux textes. Il faut donc plutôt voir La Millième nuit comme un premier pas dans un univers qui sera plus vastement étendu et détaillé dans le roman.

Nous sommes dans un avenir très lointain. L’humanité a colonisé les galaxies sans rencontrer d’autres formes de vies intelligentes autre que les traces d’une civilisation depuis longtemps disparue nommée Les Précurseurs. L’univers est vaste et soumis aux lois de la physique qui interdisent le voyage plus rapide que la vitesse de la lumière. Les déplacements ainsi que les contacts entre les différentes branches de l’humanité dispersée sont donc lents et prennent du temps. Des milliers, voire des centaines de milliers d’années. Mais l’humanité a évolué, s’est adaptée aux contraintes rencontrées à travers les galaxies, et s’est diversifiée jusqu’à parfois ne plus rien avoir en commun avec l’humain des origines. Certains individus ont choisi de se cloner pour former des lignées d’êtres quasiment immortels qui parcourent l’univers en glanant des informations sur l’apparition et la disparition des civilisations intergalactiques et témoignent de la destinée humaine. Bénéficiant dune technologie très avancée, ces lignées paraissent presque des dieux aux yeux des humains (évolués) de base. L’histoire, celle de la novella comme celle du roman, est centrée autour d’une de ces lignées constituées de 1000 clones d’Abigail Gentian. Les membres de la lignée parcourent seuls l’univers à bord de gigantesques vaisseaux (certains font plusieurs centaines de kilomètres de long !) et se réunissent toutes les deux cent mille années lors de grandes Retrouvailles pendant lesquelles ils partagent leurs souvenirs lors de festivités durant 1000 nuits. C’est ainsi que Campion retrouve sa sœur et amante exclusive – une situation mal vue au sein de la lignée – Purslane. (Purslane et Campion sont les deux personnages principaux de House of Suns).

Alors que les clones chacun leur tour livrent le récit de leurs expériences, Purslane note des incohérences dans celui de l’un de leurs frères. Cette découverte va amener Campion et Purslane à mettre à jour un crime inimaginable et l’existence d’une menace au sein même de la lignée Gentiane.

« Tel était le Grand Œuvre. Le point culminant de deux millions d’années de progrès humains : une entreprise qui exigerait toute l’ingéniosité et les ressources des lignées les plus puissantes. »

La Millième nuit, et plus encore House of Suns, est à mon avis ce qui se fait de mieux en termes de space opera sous la plume d’Alastair Reynolds. L’auteur dévoile ici un scénario relativement simple mais qui s’inscrit au sein d’un univers – qu’il donne à découvrir – d’une amplitude tout à fait hors-norme. Le simple fait de limiter le voyage interstellaire à des vitesses inférieures à celle de la lumière a des répercussions inouïes que Reynolds utilise pleinement et dont il nourrit son récit en en tirant toutes les conséquences, voire même les motivations. Si certains aspects pourront paraitre obscurs aux lecteurs novices des écris de Reynolds, il leur faudra attendre la souhaitable publication de House of Suns en français, là où tout est expliqué dans les moindres détails. La Millième nuit n’en est pas moins un formidable récit qui traverse les immensités de l’espace et du temps pour le plus grand bonheur des amateurs de space opera.

Notons que les éditions Le Bélial’ ont récemment acquis les droits d’un autre formidable roman d’Alastair Reynolds, Eversion, qui est en cours de traduction par le sémillant Pierre-Paul Durastanti.


D’autres avis : Gromovar, Un dernier livre, Vive la SFFF, Le Maki, Ombrebones, L’Albedo,


  • Titre : La Millième nuit
  • Auteur : Alastair Reynolds
  • Publication : le 25 août 2022, Le Bélial’, coll. Une Heure-Lumière
  • Traduction : Laurent Queyssi
  • Illustration : Aurélien Police
  • Nombre de pages : 144
  • Support : papier et numérique

18 réflexions sur “La Millième nuit – Alastair Reynolds

  1. Encore une fois une couverture sublimissime ! N’ayant plus de que lointains souvenirs de L’Espace de la révélation et de Janus je vais me plonger dans cette novella avec curiosité.
    P.S. Je suis en plein Summerland que je trouve génial mais j’ai eu énormément de mal jusqu’à la centième page et j’ai failli l’abandonner 2/3 fois.

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  2. J’ai sans doute été distrait, mais j’ai trouvé l’intrigue et le worldbuilding très parcellaires, fragmentés jusqu’au premier tiers/quart du roman. J’ai notamment eu du mal avec l’aspect ecto où les explications venant au goutte à goutte, j’avais du mal à me faire une vision d’ensemble et d’en comprendre les tenants et aboutissants.
    Ensuite, dès la rencontre avec l’agent traitant tout devient bien plus cohérent à mon sens, tant au niveau de l’aspect ecto qu’espionnage. C’est bluffant d’originalité. J’ai presque envie de dire à Tom Clancy de lire ce roman et de se mettre au boulot !

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    1. C’est clair que Rajaniemi ne fournit pas les clefs de son univers immédiatement et plonge le lecteur directement dans l’histoire au risque de la perdre au début. Mais heureusement les choses s’éclairent progressivement. En tout cas, je suis ravi que tu aies fini par aimer le roman !

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  3. Si la couv’ est magnifique, force est de constater que le ramage est à la hauteur du plumage ! Cette novella incarne tout ce que j’aime dans la SF : de la hard SF et du space opera à une échelle temporelle et spatiale vertigineuse. Les principaux personnages, sans être très détaillés, ne sont pas négligés non plus. Je n’ai absolument pas vu venir le retournement de paradigme au sein de la conspiration.
    L’ouvrage ne répond pas à toutes les questions soulevées, mais qu’importe car le voyage a été magnifique et aussi poétique.

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