
Sang de pierre est un recueil d’Elisabeth Vonarburg publié chez Alire en 2009 et contenant six nouvelles écrites entre 1978 et 2009. Une seule est un inédit, Terminus. Cette dernière s’inscrit dans une série de nouvelles dite du Pont et des voyageurs à laquelle appartient Le pont du froid qui est la toute première nouvelle de SF écrite par l’autrice en 1980, Le nœud (1980), La machine lente du temps (1984), Le jeu des coquilles de Nautilus (1986), La Course de Kathryn (2003), ainsi que le roman Les Voyageurs malgré eux publié en 1994. Différents personnages récurrents habitent ces textes : Talitha, Egon, ou Kathryn. Parfois les noms apparaissent sous des graphies différentes. Ainsi la Kathryn Rhymer de Le pont du froid devient Catherine Rhymer dans Les voyageurs malgré eux, puis Caterine Rimeur dans Terminus. Si le cycle s’enrichit d’une certaine intertextualité, par ses personnages mais aussi par des lieux parfois venant d’autres textes extérieurs au cycle (comme par exemple la ville imaginaire de Baïblanca décrite dans La maison au bord de la mer) et diverses allusions, les textes qui le composent peuvent se lire indépendamment les uns des autres. Ce qui les rassemble est une thématique, celle de l’exploration d’univers parallèles et du Pont qui permet de les relier.
« La réaction à la possibilité d’autres façons de voir, de penser, de vivre, d’agir, chez un nombre atterrant de gens, c’est : « Oui, bon, c’est différent ailleurs, et alors ? Nous, on est ici, on a toujours fait comme ça, pourquoi on changerait ? » Et ce, même quand la façon de faire locale a prouvé hors de tout doute qu’elle est erronée, absurde, nocive, mortelle. »
Caterine Rimeur est l’inventrice du Pont dans son univers d’origine. Caterine travaillait avec son mari Bruno sur un projet de développement de la cryogénie des corps vivants, qui aurait permis d’envisager des voyages spatiaux de longue durée. Au lieu de cela, ils découvrent ce qu’ils prennent initialement pour une forme de téléportation. Caterine se porte volontaire pour en être le premier cobaye humain et disparait. Elle a ouvert le Pont. Pendant des années, je ne révèlerai pas combien, elle va parcourir des univers parallèles, devenant une Voyageuse. Souvent dans ces univers le Pont est connu. Il existe des Centres, des moniteurs et des voyageurs spécialement formés pour se mêler aux populations locales, mais également entraînés au combat en cas de besoin, et équipés d’implants qui décuplent leurs sens. Chaque voyageur poursuit sa propre quête. Pour certains il s’agit d’installer un Pont dans les univers qui ne les connaissent pas encore. La quête de Caterine est personnelle. Contrairement à d’autres, elle n’a jamais eu le droit à l’exotisme. Chacun des univers qu’elle a rencontrés apparait comme une version uchronique de la Terre qu’elle a quittée. La même, mais avec des variations d’ordre politique, religieux, historique, écologique… Seulement voilà, à chaque nouvelle Terre, elle rencontre son double, la Caterine locale qui généralement porte un autre nom, possède une autre vie, mais qui invariablement se suicide devant elle. Et elle veut savoir pourquoi.
En lisant ce court résumé du début de l’intrigue, vous aurez compris que le ton de la nouvelle d’Elisabeth Vonarburg est sombre. Très sombre. Et ça ne va pas aller en s’améliorant.
D’Elisabeth Vonarburg je n’avais lu jusqu’ici que les deux romans Le silence de la cité et le magistral Chroniques du pays des mères. Ces lectures m’ont poussé à explorer d’autres écrits de l’autrice, notamment à travers le format court. Mon choix s’est porté sur Sang de pierre car il est assez récent et possède une coloration fortement SF. Si j’ai choisi de vous parler de Terminus, c’est parce qu’il s’agit de la nouvelle du recueil qui m’a le plus secoué. Elisabeth Vonarburg ne s’étend pas sur le côté technique ou scientifique des choses, ce n’est pas son propos. Elle s’intéresse à la transformation du monde et des vies humaines. Parfois à grande échelle, celui des civilisations, parfois à l’échelle des individus, comme c’est le cas ici avec le personnage de Caterine.
Terminus est un texte prenant, dont le scénario ne cesse de surprendre car il ne nous emmène jamais là où on voudrait aller, où on préférerait aller. Elisabeth Vonarburg n’essaie pas de faire plaisir au lecteur. A conseiller si vous aimez vous prendre des coups et ressortir d’une lecture la vrille au ventre. Ou simplement si vous aimez lire des textes extraordinairement bons.

Tu nous avais prévenu, je sens le challenge dans le challenge.
La bonne nouvelle, c’est que tu vas alimenter à toi tout seul notre nouveauthèque. 😀
Je n’ai jamais rien lu d’Elisabeth Vonarburg mais ca ne me tente pas du tout.
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Et tu n’as pas encore réalisé qu’il y a un challenge dans le challenge dans le challenge…
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Je viens de comprendre…
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