
Il y a un an, la revue Bifrost publiait son centième numéro qu’elle consacrait à un ami et collaborateur historique de la publication, le dénommé Thomas Day. Ce fut pour les contributeurs de Bifrost, l’occasion de lire ou relire (à leurs risques et périls) les œuvres de l’auteur et proposer un cahier critique qui, fidèle à la réputation d’intransigeance de la revue, se montra sans complaisance. Que tu sois un ami ou pas, tu te feras écharper comme les autres. Qu’est-ce que tu crois ?
Pour ma part, j’ai contribué sur deux textes. Voici ma recension de This is not America écrite dans le cadre de cette hagiographie dayienne.
Ce n’est pas l’Amérique mais c’est Thomas Day, il n’y a aucun doute à ce sujet. Le court recueil This is not America regroupe trois nouvelles proposant un regard désaxé sur des figures classiques de la culture américaine, historique ou pop, dans des versions proprement hallucinées. Il y a clairement un côté Quentin Tarantino un soir de repoudrage de narine là-dedans. Ouvrons le bal des déjantés avec Cochrane, De Vries et Frenkel. Ces trois-là sont en cavale à travers le Texas car ils viennent de faire sauter le crâne d’un certain JFK à Dallas. Nous sommes le 22 novembre 1963 et la nouvelle s’appelle « Cette année-là l’hiver commença le 22 novembre ». L’assassinat le plus célèbre de l’Histoire, la théorie du complot, cette Amérique là nous est familière. Ce qui nous l’est moins c’est que les trois gusses ont flingué en étant persuadés de défendre le monde d’une invasion alien. JFK aurait été le réceptacle d’un méningéophage, une entité biologique extraterrestre squattant le cerveau de son hôte pour prendre sa personnalité. D’ailleurs, on le voit très bien lors du tir fatal quand… enfin, passons sur les détails sordides. Entre JFK et la zone 51, Thomas Day détourne les icônes de la pop culture pour livrer au lecteur un récit haletant de bout en bout qui joue sur un joyeux renversement de perspective.
Les choses se compliquent avec « American Drug Trip ». À peine entré dans ce texte, on se sent l’envie d’appeler son avocat et de plaider coupable d’abus de substances illicites. Le texte a un but et un seul : nous expliquer comment on peut se retrouver assis au bord du monde à raconter à un ours armé et peu compatissant pourquoi on trimballe un crocodile dans le coffre d’un break Rocco Siffredi’s Motors. L’esprit humain n’est naturellement pas équipé pour suivre les méandres de ce scénario improbable mais drôle et bourré de clins d’œil. C’est un peu comme si Butch Coolidge avait tapé dans la réserve personnelle de Marsellus Wallace et trébuché sur l’interstice entre les univers parallèles. Non, attendez… c’est exactement ça !
Le troisième et dernier texte est plus décevant. « Eloge du sacrifice » montre le président américain coincé à bord d’Air Force One en compagnie d’extraterrestres et forcé à revivre les morts de héros de l’humanité. Et il meurt et remeurt, incarnant des figures historiques au moment de leur trépas. L’idée de départ est séduisante mais n’aboutit pas au feu d’artifice qu’on pouvait attendre. Ou alors la cure de désintoxication nécessaire suite à la nouvelle précédente nous aura trop assagi.
Dans le cadre d’une découverte des œuvres de Thomas Day, la lecture de This is not America n’est pas indispensable. Mais le recueil offre un petit moment de plaisir coupable et amusant, il serait dommage de s’en passer – pour peu qu’on parvienne à mettre la main sur ce petit bouquin désormais introuvable.
- Titre : This is not America
- Auteur : Thomas day
- Publication : février 2009, ActuSF, coll. Les trois souhaits.
- Nombre de pages : 126
- Format : papier (indisponible)
Bonjour.Il est encore disponible dans certaines BMVR.. Les inconditionnels de l’auteur seront ravis.
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Grâce à cette critique (et à ma récente lecture de « 7 secondes… »), j’ai eu envie de lire ce recueil et j’ai trouvé le moyen de le commander (en occasion). Me réjouis d’avance !
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Et tu as bien raison !
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