
Nonobstant l’accueil glacial qu’elle a reçu et continue de recevoir de manière inexplicable de la part des lecteurs français, fort critiques à son égard, et je soupçonne une incompréhension totale face à ce type d’humour, doublée d’un snobisme littéraire inculqué dès le plus jeune âge par l’entremise d’une pédanterie académique qui a classé depuis longtemps la SFFF dans les sous-genres de bas étage, enfin passons, la série Laundry Files de Charles Stross est légendaire. Et pis c’est tout.
Charles Stross s’est fait une spécialité de revisiter tout. Par tout, je veux dire, les classiques de la SF, de l’horreur, de la fantasy, et développant là où les auteurs classiques des genres suscités s’étaient arrêtés, en y apportant fraîcheur, connaissance encyclopédique, humour geek et vision hard-SF de haute volée.
Dans les Laundry files, Stross revisite et modernise le Mythe de Cthulhu, sous la forme de nouvelles et de romans d’espionnage qui relèvent de l’Histoire Cachée. En gros, on y suit les enquêtes de la branche ésotérique des services secrets anglais, celle qui s’occupe de raccompagner vers la sortie les créatures d’autres plans d’existence qui s’aventureraient dans notre univers. De cela, nous autres pauvres citoyens, n’en savons habituellement rien, car le gouvernement veille à nous cacher ce qui se trame dans les ombres de l’Histoire. Pour notre bien et on l’en remercie.
Equoid s’inscrit dans la série après The Jennifer Morgue et avant The Fuller Memorandum. La nouvelle est ainsi officiellement numérotée 2.9. Mais il n’est pas nécessaire d’avoir lu les romans précédents de la série pour aborder Equoid, Charles Stross prenant soin de rappeler ce dont il s’agit. S’il est habituellement accepté que les Laundry Files ne s’inscrivent pas dans l’univers de Lovecraft, mais s’en inspirent librement, le paradigme change avec Equoid. Il s’agit de la plus lovecraftienne des nouvelles des Laundry Files. Le maître de Providence y est même un personnage à travers une imaginaire correspondance écrite à destination de Robert Bloch sur son lit de mort. Stross imagine les lettres écrites par HPL, dans le style ampoulé de HPL, et y explique certains traits de caractère de HPL. C’est fait avec beaucoup d’humour, et sans complaisance pour les travers du maître. En ce qui concerne l’histoire, c’est encore du Lovecraft, et un Grand Ancien s’y manifeste. Je ne dirai pas lequel, pour préserver la surprise. (Il est aussi fait de manière implicite référence au roman anglais Cold Comfort Farm de Stella Gibbons et au secret gardé de ce qui s’est réellement passé dans le hangar à bois). Il est à noter qu’il y a dans cette nouvelle une scène centrale, qui relève de l’horreur, et qui implique un jeune fille de 13 ans, qui a beaucoup choqué le lectorat américain. Je reconnais que cette scène peut être choquante et que Stross a été un peu loin. Sinon, toute l’histoire tourne autour des Licornes. Sauf qu’évidemment, chez Stross avec sa manie de détourner les mythes, et avec l’aide de Lovecraft, une licorne est ici une abomination qu’il faudrait éradiquer au napalm.
Conclusion ? C’est un des bons écrits de la série des Laundry Files. C’est aussi une très bonne manière d’aborder la série si vous voulez vous en faire une idée. Tout y est. Il n’est dès lors pas étonnant que la nouvelle ait reçu le prix Hugo du meilleur roman court en 2014.
D’autres avis de lecteurs : Symphonie
Livre : Equoid
Auteur : Charles Stross
Série : Laundry files
Publication : 2013
Langue : Anglais
Traduction : Non
Nombre de pages : 65
Format : ebook
Des licornes maléfiques ? Je prends !
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Attention, tu ne regarderas plus jamais les licornes de la même manière. Je décline toute responsabilité dans les effets secondaires à cette lecture.
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Vendu comme ça… direct dans ma Pile à acheter ! ❤
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Oui, je ne peux qu’applaudir le paragraphe introductif ! Ce dédain a tout à voir à mon avis avec l’humour particulier de cette série : très geek, référencé, avec un coté « je fais le malin » qui a irrité pas mal de ceux à qui j’ai tenté de la faire découvrir. D’ailleurs l’idée même d’humour dans cet univers doit paraître saugrenue à beaucoup.
J’ai lu récemment le Dossier Rhésus et alors que je craignais un essoufflement de la série, que le détournement me paraissait un peu facile (de banquiers suceurs de sang, non ?!), j’en suis ressorti un peu secoué mais ravi.
Pour revenir à Equoïde, j’ignorais (mais en suis-je surpris ?) que ce texte avait fait des vagues… je l’avais moi même trouvé un chouïa « malaisant »…
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C’est le plus horrifique des textes de Stross que j’ai lu. Il y a en effet un fort côté « malaisant ».
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