Pleurons sous la pluie – Tanith Lee

Les éditions Le Passager clandestin proposent, par des rééditions de textes courts dans une collection dédiée, Dyschroniques, de faire redécouvrir un catalogue de nouvelles et novellas appartenant à l’histoire de la science-fiction, d’auteurs plus ou moins connus, et qui s’inscrivent dans une ligne éditoriale axée sur des thématiques sociales allant de l’écologie aux luttes pour les droits civiques. En ce mois de février, c’est une longue nouvelle de l’autrice britannique Tanith Lee (1947-2015) qui est mise à l’honneur. Au-delà des textes publiés, ce qui fait la singularité et l’intérêt de cette collection est le paratexte qui les accompagne et permet une mise en contexte historique et sociétal. Pleurons sous la pluie a été écrit et publié à l’origine en 1987, soit un an après la catastrophe de la centrale nucléaire de Tchernobyl où l’explosion du réacteur a provoqué l’émission d’un panache de poussière radioactive qui a contaminé le ciel, et conséquemment le sol, de l’Europe.

C’est suite à ces événements que Tanith Lee a imaginé un avenir dans lequel la pollution atmosphérique est devenue telle que l’espérance de vie moyenne ne dépasse guère les trente ans pour les plus défavorisés, et que les plus riches vivent sous l’atmosphère contrôlée de villes protégées par un dôme. L’idée d’une ségrégation géographique entre riches et pauvres, à l’intérieur et à l’extérieur de cités fermées et mises sous cloche n’est pas particulièrement originale, me direz-vous. C’est même un trope science-fictive si répandu qu’Alain Musset y a consacré un essai, Station Metropolis direction Coruscant, paru dans la collection Parallaxe chez Le Bélial’. Cependant, Tanith Lee aborde la thématique à travers le regard d’une jeune fille de 15 ans, habitant les quartiers extérieurs, que la sévère mère vend à un veuf résidant de la cité. C’est ce point de vue à hauteur d’homme, ou en l’occurrence de femme, qui donne au texte sa puissance et sa littérarité. Aussi dure que soit la relation entre la fille et la mère, elle est entièrement basée sur une nécessité, celle de la survie, et ne tombe jamais dans le sentimentalisme facile. Pleurons sous la pluie est un conte cruel et lucide, qui produit chez le lecteur un malaise se propageant au-delà des pages une fois le livre refermé. C’est un superbe texte, et une belle leçon d’écriture.


D’autres avis : Gromovar, Yuyine,


  • Titre : Pleurons sous la pluie
  • Autrice : Tanith Lee
  • Publication originale : Crying in the rain, 1987
  • Traduction : Iawa Tate
  • Edition : 16 février 2024, Le Passager clandestin, coll. Dyschroniques
  • Nombre de pages : 80
  • Support : papier (6 €) et numérique (4,99 €)

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