
Quantum Space est le premier livre de Douglas Phillips. L’ouvrage est présenté comme un page turner de Hard-SF. Si vous avez un peu parcouru ce blog, vous savez que dès lors que résonnent au loin les mots Hard-SF, je suis comme le loup qui a senti l’odeur du sang au fond des bois.
Le récit prend place ici et maintenant. Un module Soyouz ramenant deux cosmonautes et un astronaute après trois mois passés à bord de la station spatiale internationale disparaît au dessus du Kazakhstan lors de sa rentrée dans l’atmosphère. Réminiscence de l’accident de la navette américaine Columbia quelques années auparavant. Mais voilà, une heure après l’accident, une courte transmission radio provenant du Soyouz disparu est captée au sol.
Christine Shea, la conseillère défense du président des Etats-Unis, va envoyer Daniel Rice, conseiller scientifique de la maison Blanche, et Marie Kendrick, des opérations spéciales de la NASA, pour enquêter au Fermilab. Le Fermilab est l’équivalent américain du CERN. Le lecteur critique marquera là une pause dubitative sur le rapport entre la physique des hautes énergies et la disparition d’un Soyouz. Ce n’est pas grave, Christine Shea le fait, elle, le rapport. Le but est vérifier si « le projet secret Diastasi » n’aurait pas un quelconque rapport avec la disparition du Soyouz : « Ce n’est probablement rien, mais… ». Mouais…
A partir de cette entrée en matière pour le moins bancale, car rien ne justifie certaines mises en place, Douglas Phillips va proposer aux lecteurs de Quantum Space une enquête menée tambour battant dans le monde des particules élémentaires. Ecrit dans un style rapide et direct, avec des chapitres courts dans lesquels l’histoire avance rapidement, et qui emprunte fortement au style de Dan Brown, ce roman s’adresse à un public large qui n’a aucunement besoin de posséder des connaissances pointues en science pour apprécier le récit. Nous sommes là loin des écrits de Greg Egan. Les notions scientifiques sur lesquelles l’histoire de Douglas Phillips repose (théorie des particules, modèle Standard, oscillation des neutrinos, théorie des cordes) sont exposées brièvement mais très efficacement dans les discussions entre les personnages du roman. L’auteur n’entre pas dans des détails inutiles et sa présentation est remarquable de clarté et de sobriété. Je dois lui accorder cela. N’ayez donc aucune crainte, ce roman est très soft côté sciences dures.
Dans cet exposé léger de l’état des connaissances scientifiques, Douglas Phillips crée un point de divergence, dans le sens uchronique du terme : la découverte du Boson de Higgs au CERN, en 2012, s’est accompagnée d’une confirmation de la théorie des cordes posant l’existence de trois dimensions au niveau macroscopique et 7 supplémentaires au niveau microscopique.
Je dois avouer que la première moitié du livre, celle où l’enquête démarre et où les bases conceptuelles sont posées, m’a laissé dubitatif. Il y a un travers qu’on retrouve très souvent dans les romans de SF qui tentent d’ancrer le récit dans le présent, le réel et la science comme pour s’excuser d’être de la science-fiction : cela sonne hésitant, artificiel et maladroitement mené.
Les choses changent au milieu du livre lorsque le récit part soudain dans une toute autre direction et devient un roman de « premier contact ». Il n’est pas totalement novateur puisqu’il nous ramène vers la grande époque du New Space Opera (on pense notamment à Grand Central Arena de Ryk E. Spoor), mais possède tout de même suffisamment d’originalité et de sense of wonder pour mériter le détour. Douglas Phillips arrête de s’excuser de faire de la SF et entre enfin pleinement dans le propos. Il a de plus l’intelligence d’éviter les petits hommes verts et propose quelque chose de nettement plus intéressant et ambitieux. Tellement ambitieux, que je me demande bien comment il va pouvoir donner suite à ce premier tome de ce qui est annoncé comme une trilogie.
Quantum Space est un page turner, non pas de Hard-SF, mais de soft-SF tranquille et orientée grand public. Ce n’est pas un livre qui va transporter le lecteur averti de science-fiction mais je pense qu’il peut s’agir d’un bon point d’entrée moderne dans le genre. Je lui reprocherais le style très marqué « dans l’air du temps » avec tous les défauts du best-seller de gare ne présentant aucune originalité dans la forme. Personnellement, ce type d’écriture n’est pas ma tasse de thé, mais je comprends son intérêt dynamique. Un autre défaut est le manque de balance. Tout se passe toujours trop bien dans ce roman. Il n’y a aucune force d’opposition à même de créer une tension dans le récit. Toutefois, il propose une histoire intéressante et qui potentiellement peut devenir très ambitieuse s’il ne se gamelle pas magistralement dans les tomes à suivre. On notera aussi au passage un point de vue simple mais pertinent sur le paradoxe de Fermi. Ce premier tome peut se suffire à lui-même et, sans être révolutionnaire, constitue un bon moment de lecture, même s’il n’est pas un grand moment de SF.
Les choses se gâtent dans le deuxième tome.
Livre : Quantum Space
Série : Quantum Series (Book 1)
Auteur : Douglas Phillips
Publication : 2017
Langue : Anglais
Nombre de pages : 362
Traduction : Non
Format: papier et ebook
La tu éveilles ma curiosité. Entre le paradoxe de Fermi et le boson de Higgs, je me demande vraiment ce que l’on peut faire pour avoir un thriller SF mené tambour battant. Mais, c’ets justement ce qui en fait le sel, n’est-ce pas?
Je me le note, et je sens que ma PAL va encore prendre un tour…
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Comme je le dis dans ma critique, ce n’est pas un grand livre de SF, mais toi qui aime les histoires de premier contact, ce côté là devrait te plaire.
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C’est pour cela que cela a fait tilt chez moi!
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