Even if Such Ways are Bad – Rich Larson

L’un des fondements de l’œuvre de fiction est la suspension de l’incrédulité à laquelle le spectateur, face à la scène ou à un écran, ou le lecteur, devant la page d’un livre, doit consentir pour accepter, le temps de l’exposition à l’imaginaire d’un auteur, de vivre une expérience sensitive et émotionnelle en dehors de la réalité. C’était le cas déjà du temps d’Homère, encore lorsque Shakespeare demandait à son auditoire de créer des armées imaginaires, et toujours aujourd’hui dans ces genres qu’on appelle la science-fiction et la fantasy. Les conteurs font preuve de plus ou moins de délicatesse dans cet art.  Certains déploieront des trésors de manières pour vous amener à petites touches là où ils le souhaitent sans trop vous heurter. D’autres sont juste des sauvages de la pire espèce qui n’ont aucune considération pour votre santé mentale, et plus ça vous flingue les neurones, plus ils sont ravis. Rich Larson survole cette dernière catégorie. Une brute épaisse.

Lire Rich Larson est toujours une expérience. Rien ne vous prépare véritablement à entrer dans son univers tordu en plus de dimensions qu’il n’en faut pour faire de l’origami de votre raison. Quelqu’un comme Peter Watts, qui s’y entend fort bien aussi en la matière, procède à dessein, dans l’espoir de vous faire entendre que le monde devient fou. Rich Larson, même pas. De sa part, c’est totalement gratuit. De la pure violence poétique.

L’auteur, canadien peut-être – on a abandonné l’idée de lui trouver une nationalité ou un port d’attache – a publié une nouvelle, ou plutôt une hallucination fiévreuse dans les pas du Naked Lunch de William S. Burroughs, titrée Even if Such things are Bad sur le site Tor.com en février dernier. Vous pouvez la lire (en anglais) à vos risques et périls en suivant ce lien.

Je pourrais vous dire que le récit se déroule dans un futur lointain, qu’il y existe une diaspora humaine dans la galaxie, que des vaisseaux organiques creusent l’espace-temps pour traverser les distances. Je pourrai vous dire qu’un type du nom de Chimezie, employé par une compagnie minière, est envoyé vers une lointaine destination à bord d’un de ces vaisseaux piloté par une certaine Mola. Je pourrais aussi vous dire que Chimezie s’est volontairement cramé la mémoire pour échapper à de vilains traumatismes et que Mola va s’en mêler. Je pourrais encore vous dire que Chimezie comprendra pourquoi il est ici et pourquoi on l’envoie là où il va.

Mais ce serait tenter de résumer sans aucun talent une expérience de lecture au-delà de la perception immédiate des sens telle que Rich Larson, doté lui d’un immense talent, vous propose dans ce texte. Alors plutôt que vous dire tout ça, je vais juste vous laisser vous retourner le cerveau en lisant ce petit bijou qu’est Even if Such things are Bad.


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