Guide des genres et sous-genres de l’imaginaire – Apophis

Personnellement, je n’ai jamais bien compris qu’on range dans le même rayon fantasy et science-fiction. On me rétorquera qu’elles forment avec le fantastique ce que l’on nomme les littératures de l’imaginaire et que leurs lectorats se confondent. Ce qui est au mieux une approximation, au pire un argument commercial.  La science-fiction et la fantasy sont des termes génériques désignant des genres littéraires larges qui regroupent des sous-genres distincts variant beaucoup dans leur approche et leur contenu.

De fait, il existe un véritable foisonnement des dénominations des courants et des sous-genres de l’imaginaire, et de tout un tas de personnes (c’est-à-dire deux ou trois) qui s’écharpent sans jamais réussir à se mettre d’accord. La SFFF, c’est un peu comme le metal, et il ne s’agit pas de confondre le Gothenburg melodic death metal d’At the Gates et le Grindcore de Napalm Death, ça n’a rien à voir.

Alors certes, chaque fois que quelqu’un évoque à voix haute un sous-genre ou un autre dans une convention, il y a un auteur français de fantasy pour lever les yeux au ciel et ricaner, entouré de sa cour à la terrasse d’un café de Nantes. (Ça sent le vécu, non ?).  Ne vous méprenez pas, je trouve cette réaction très saine ! Non pas parce que « Aaaaah, la Littéraaaaaature » mais parce qu’il est bon qu’un auteur ne s’en préoccupe pas. Dans ma courte expérience dans le monde de l’édition, je n’ai rien croisé de plus catastrophique qu’un auteur qui vous envoie un manuscrit en vous disant qu’il a écrit un roman de [insérer ici un sous-genre] à la manière de [insérez ici deux ou trois noms connus dans ledit sous-genre]. Ca arrive très souvent et le résultat est toujours extrêmement pauvre. Donc, chers auteurs, continuez à rire les yeux au ciel sans vous préoccuper des genres et des sous-genres, ce n’est pas ce qu’on attend de vous. Laissez cela à d’autres. Ecrivez votre livre, l’histoire que vous voulez raconter. (Essayez tout de même qu’elle soit intéressante, contrairement à celle de l’auteur dont je mentionnais ci-dessus le ricanement et dont j’ai abandonné la lecture du livre tellement génial que j’en mourais d’ennui).

Face à l’arborescence complexe des genres et des sous-genres du metal ou de l’imaginaire, il existe donc deux attitudes possibles, aussi respectables l’une que l’autre : s’en foutre complètement ou s’y intéresser. Pas plus compliqué que ça.

Si vous vous y intéressez, et souhaitez explorer la taxonomie des littératures de l’imaginaire, il existe un guide écrit par Apophis à partir des très nombreux articles sur le sujet qu’il a publiés sur son blog spécialisé et publié dans une première version numérique en 2018 par Albin Michel imaginaire, puis dans une version révisée et augmentée en ce début 2023 avec pour l’occasion une sortie en version papier.

Le Guide des genres et sous-genres de l’imaginaire (c’est son nom) est une référence en France dans le domaine (j’ignore s’il en existe un équivalent ailleurs, je ne le crois pas). Précisons qu’il ne s’agit pas d’une recherche universitaire prétendant donner de nouvelles définitions à travers une étude phylogénétique des courants qui ont animé les littératures de l’imaginaire, mais d’un guide fournissant de manière détaillée et argumentée, un panorama complet des dénominations qui font plus ou moins consensus, avec tout de même quelques apports pour de nouvelles catégories exotiques, voire des inventions humoristiques comme le zadpunk d’un autre blogueur, Gromovar. L’ensemble est organisé en huit parties de manière à être clair et compréhensible sans se faire des nœuds au cerveau ou se décourager devant la foultitude de termes. Notons que l’ouvrage fournit aussi des outils critiques pour réussir à démêler soi-même l’écheveau, ainsi que de nombreux exemples d’œuvres se rapportant à chaque sous-genre, bien évidemment.

À qui s’adresse ce guide ? Comme je le disais ci-dessus, à toute personne que ça intéresse : lecteurs qui souhaitent découvrir les sous-genres existants, ceux qui cherchent à approfondir la taxonomie et affiner leurs goûts, mais aussi, et peut-être surtout, aux bibliothécaires et libraires qui souhaitent s’armer pour pouvoir répondre de manière précise aux lecteurs en quête d’ouvrages dans des domaines particulièrement ciblés.  Genre : « vous avez quoi en nanopunk ? » (Oui, les lecteurs qui auront lu ce guide vont vous poser des problèmes…)

Je ferai tout de même deux critiques. La première, sur la forme. Sans doute pensé pour être le plus simple possible dans sa présentation, je trouve la mise en page un peu trop minimaliste. Un effort aurait pu être faire pour rendre l’ouvrage un peu plus moderne et visuellement attrayant. La seconde : il n’est jamais question de SF post-éganienne…  ¯\_(ツ)_/¯


  • Titre : Guide des genres et sous-genres de l’imaginaire
  • Auteur : Apophis
  • Publication : 15 février 2023, Albin Michel Imaginaire
  • Nombre de pages : 176
  • Support : papier et numérique

Sur le site de l’éditeur.


13 réflexions sur “Guide des genres et sous-genres de l’imaginaire – Apophis

  1. Merci pour ce sympathique article, j’ai beaucoup aimé le « Genre : « vous avez quoi en nanopunk ? » (Oui, les lecteurs qui auront lu ce guide vont vous poser des problèmes…) », il m’a bien fait rire parce que j’ai l’impression que des cas dans ce genre là, il va y en avoir au moins quelques-uns 😀

    (Concernant la SF post-Eganienne, la Progression Fantasy ou quelques autres sous-genres, il fallait bien garder quelques munitions soit pour la troisième édition, en 2032, soit pour le blog 😉 )

    Aimé par 1 personne

  2. Personnellement, sans être une initiée, j’aime bien les classification, car nous avons des affinités avec certaines nuances des SFFF, tandis que d’autres nous laissent indifférents. Ayant lu la première version, je suis très enthousiaste à l’idée de découvrir cette seconde.
    J’apprécie beaucoup la façon de tu présente la « chose ».

    bises

    Aimé par 2 personnes

  3. Je fais partie de ces lecteurs qui se foutent assez franchement d’une quelconque classification. Le guide d’Apophis en lui-même est un travail considérable et admirable et je l’ai acheté . Cette manie de vouloir tout classer, ordonner, ranger, étiqueter est très humaine et habite le scientifique que je suis. Ce sera très utile pour les libraires, les bibliothécaires et certains lecteurs. Cependant, il ne faut pas perdre de vue (selon moi) que tout contenu littéraire romanesque doit offrir une diversité suffisamment complexe , sinon on tombe rapidement dans l’ennui. Le choix de mes lectures ne repose pas sur une classification, aussi bonne soit-elle.

    J’aime

    1. Cette volonté de vouloir classer, ordonner, ranger, étiquer n’a pour but que de simplifier la communication. Les philosophes inventent des mots pour couvrir des concepts. Les physiciens aussi. De la même manière, on invente des noms en littérature, parce que cela permet de ne pas avoir à le redéfinir à chaque fois un ensemble de caractéristiques. C’est tout. Personnellement, une classification orientera mes choix. J’irai a priori plus vers un livre de hard-SF ou de cyberpunk que vers un livre d’urban fantasy, parce que je sais que ce sont des catégories qui répondent plus à mes envies de lecteur. Cela étant dit, je pense que tout le monde sera d’accord avec toi pour louer une diversité suffisamment complexe.

      J’aime

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.