
En octobre 2019, les éditions Albin Michel Imaginaire publiaient Rivages, le premier roman de fantasy d’un nouvel auteur français, Gauthier Guillemin. Plus que véritablement fantasy, à mon sens, le roman se faisait ode au voyage et à l’imaginaire, comme échappatoire au réel. A la fin du mois de mars 2020, l’éditeur publie le second roman de l’auteur, La Fin des étiages, qui est une suite à Rivages. Dans Rivages, le Voyageur quittait sa cité moderne humaine pour s’évader en forêt, dans le Domaine. Il y rencontrait un peuple ancestral et magique, les Ondins. Mais ce peuple est un peuple fatigué, qui a perdu ses origines, tout comme leurs ennemis de toujours les Fomoires. Tous sont enfermés dans des mythes qui n’ont pour eux plus de sens. Par son émerveillement, son goût de l’aventure, son besoin d’aller voir plus loin, et une certaine candeur propre aux exilés volontaires, le Voyageur réveillait ce désir oublié de découverte chez les Ondins. Rivages était l’histoire du Voyageur. Rivages n’avait pas besoin de suite. L’histoire du Voyageur se suffisait à elle-même. Il n’en est pas de même en ce qui concerne le monde imaginé par Gauthier Guillemin, et dans ce second opus, on lit l’envie de l’auteur de revenir explorer le Domaine.
La Fin des étiages est de ce fait un roman très différent de son prédécesseur, plus franchement inscrit dans le genre et dans une certaine tradition du récit de fantasy épique tout en allant fricoter sérieusement avec le steampunk. La Fin des étiages n’est plus l’histoire du Voyageur. Celui-ci est absent (ou presque) du récit. C’est l’histoire des peuples qui habitent le Domaine. Celle des Ondins qui ont rencontré et vécu avec le Voyageur. Nous suivons les aventures des quelques personnages secondaires qui ont accompagné le Voyageur dans Rivages. Il y a Sylve, sa compagne ondine, qui est lassés d’attendre telle Pénélope le retour de son Ulysse parti depuis neuf mois et décide de vivre sa propre aventure. Il y a Quentil, son compagnon d’arme lui aussi parti à l’aventure à la fin de Rivages. Il va voir Nar-î-Nadin, la cité des Nardenyllais. Il y découvrira que ces derniers semblent enclin à suivre la voie sans issue des humains et montrent des ambitions allant à l’encontre de l’équilibre du Domaine. Mais c’est aussi, et c’est là une heureuse surprise, celle des Fomoires qui dans Rivages se présentaient comme une race d’Orques guerriers et sanguinaires. Guerriers et sanguinaires, ils le sont toujours, mais leur culture, leur histoire, et leur quête présente sont contés tout autant que les Ondins. Ce sont eux qui au sein de la forêt vont faire une découverte qui va changer leur monde à tous. Les alliances, les ennemis, les amis, ces rôles de toujours vont se redéfinir face à de nouvelles menaces et le réveil de peuples oubliés.
Plus nerveux, plus violent, mais aussi moins focalisé, La Fin des étiages propose non pas une suite mais une extension de l’univers abordé dans Rivages. Le roman erre un peu dans sa première moitié qui constitue une longue mise en place où on cherche parfois un fil directeur, mais il se recentre dans sa seconde moitié lorsque le récit s’accélère et que les arcs narratifs se nouent. Il y a aussi des choix narratifs surprenants, comme celui de raconter de manière directe les aventures de Quentil et indirecte celles de Sylve. Mais il y a surtout cette exploration du monde, de ses habitants, de ses mythes fondateurs et de son histoire.
Dans Le Seigneur des anneaux de J.R.R. Tolkien, les elfes quittent les terres du milieu et s’ouvre l’ère des hommes. Tolkien annonçait ainsi la fin du merveilleux. Gauthier Guillemin propose l’inverse, exactement. Parmi les épigraphes qui ouvrent chacun des 13 chapitres, il n’est pas surprenant que le tout dernier soit une citation de Tolkien. La duologie Rivages / La Fin des étiages est un anti-Seigneur des anneaux. Rivages annonçait la fin de l’ère humaine. La Fin des étiages annonce une nouvelle ère pour les peuples mythiques.
La Fin des étiages est un roman qui surprendra certainement ceux qui ont lu Rivages et s’attendent à retrouver le même ton dans ce second roman. Gauthier Guillemin opère un virage complet autant dans le mode du récit que dans les questions qu’il pose vis-à-vis du rôle des mythes et de la recherche des origines. Mais il y subsiste à l’identique la quête d’un rapport à la nature et à l’imaginaire, avec ce même goût pour les mots et la poésie.
Pour aller plus loin, je vous recommande l’interview de l’auteur sur le site Les chroniques du Chroniqueurs.
D’autres avis : Acaniel, Au pays des cave Trolls, Yuyine, Les chroniques du chroniqueur, Xapur, La bibliothèque d’Aelinel,
Titre : La Fin des étiages
Série : Rivages – tome 2
Auteur : Gauthier Guillemin
Publication : initialement prévue le 25 mars 2020 chez Albin Michel Imaginaire
Nombre de pages : 304
Format : Grand format et ebook
Prix : 19,9€
Je viens de le commencer et c’est vrai que pour le moment c’est très différent de Rivages.
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Et plus encore par la suite.
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et donc : tu as aimé ou non ? parce que c’est bien vrai, j’ai adoré revenir dans le Dômaine et avancer avec d’autres personnages auxquels je m’étais attaché.
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Oui, car j’ai trouvé que cette approche différente enrichissait pleinement l’univers. (N’est-ce pas évident dans ma chronique ? Il faut peut-être que je sois plus clair.)
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non, c’est juste l’auteur qui a besoin d’être rassuré à la veille d’une non-sortie 😉
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Petite erreur sur le prix de vente.
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Corrigée !
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Très intriguant, il faut vraiment que je me penche sur cette saga, j’aime l’idée d’un « anti Seigneur des anneaux » ^^
Merci pour la chronique 🙂
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Etonnant de voir un tel changement, l’aspect bucolique m’avait bien plu dans le premier.
Au moins, c’est un diptyque qui se tient alors. Je préfère ça 🙂
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Olalala, entre ton évocation du Steampunk et le fait que ça se constitue comme un anti-Seigneur des anneaux, tu piques ma curiosité comme pas possible, je sens que je vais adorer le lire et l’analyser.
Merci beaucoup pour cette chronique !
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Je trouvais aussi que Rivages se suffisait à lui-même mais qu’on avait une certaine frustration quand à la découverte de l’univers. Je suis ravie d’apprendre que c’est exactement ce qu’offre ce nouvel opus. Le côté plus nerveux ne sera pas non plus pour me déplaire. J’ai hâte de m’y plonger.
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La fin des étiages, une suite qui n’est pas complètement une suite mais un autre regard sur le monde du domaine. L’action est plus intense et le monde s’enrichi. La nature reste au centre du propos et la magie du récit est de laisser le lecteur livré à sa propre imagination. Certes on retrouve les mêmes personnages et peuples que dans rivage mais avec des nouveaux. J’imagine que d’autres aspects de ce monde nous seront accessibles.
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