Cinquante fleurs pour te briser le cœur – GennaRose Nethercott

Conteuse, folkloriste et poétesse itinérante, souvent accompagnée d’un théâtre d’ombres chinoises, GennaRose Nethercott s’est fait connaître avec son premier roman, Thistlefoot (2023), inspiré du folklore slave. Elle y convoquait la figure de Baba Yaga et l’histoire des pogroms durant la guerre civile russe (1918 -1921), qu’elle mêlait à des archétypes de l’horreur contemporaine, pour livrer un conte moderne sur le devoir de mémoire. Traduit en français par d’Anne-Sylvie Homassel, La Maison aux pattes de poulet est paru chez Albin Michel Imaginaire en janvier 2024, avec une couverture signée Anouck Faure.

L’année suivante, l’autrice confirmait son univers singulier avec Fifty Beasts to Break Your Heart (and other stories), un recueil de quatorze nouvelles. Sa traduction française, Cinquante fleurs pour te briser le cœur, paraîtra prochainement, le 1 octobre 2025, chez le même éditeur, à nouveau porté par le duo Homassel/Faure, comme il se doit. Le ton, sombre, s’inscrit dans la continuité du roman : un imaginaire hybride qui donne naissance à des contes contemporains enracinés dans une tradition orale, hantés par des fantômes, des créatures fantastiques, des amours et des morts. Certains textes flirtent ouvertement avec l’horreur, voire le body-horror, mais l’ensemble est mu par un élan poétique et nostalgique. Comme dans les contes traditionnels, la noirceur du fond se dissimule derrière une forme envoûtante.

La nouvelle qui donne son nom au recueil, Cinquante fleurs pour te briser le cœur, s’ouvre sur une définition pourrait servir de lettre d’intention à l’ouvrage :

Bestiaire (bɛs·tjɛʁ)

  1. Recueil médiéval de récits allégoriques ou moraux décrivant l’aspect et les coutumes d’animaux réelles ou imaginaires.
  2. 2.a. : Recueil de descriptions ou de représentations d’animaux réels ou imaginaires.
  3. 2.b. : Groupe de personnes réelles ou de personnages littéraires ayant la plupart du temps une signification symbolique.
  4. 3. Collection singulière ou fantaisiste dans sa conception.

Et sa morale peut être résumé par cette autre passage tiré du texte qui ouvre le livre :

« Certains disent que l’Escalier de l’éternité conduit en enfer. Cette information n’a été officiellement ni confirmée ni infirmée ». Le soleil se couche sur l’escalier de l’éternité. p.18

Si chacun des quatorze textes peut se lire comme un conte poétique, Nethercott varie les dispositifs narratifs. À côté des récits classiques, rédigés à la troisième personne et aux temps du passé, surgissent de adresses au présent, à la deuxième personne, qui engagent le lecteur. Le recueil déploie également des formes inattendues : un dictionnaire magique, un bestiaire imaginaire, un calendrier hanté. Cette diversité enrichie l’ouvrage et chaque texte renouvelle sa manière d’être lu, voire dit à voix haute. On retrouve là le goût du théâtre de l’autrice.

Les protagonistes sont souvent de jeune femmes ou de jeunes hommes, pris dans des histoires d’amour funestes, qui m’ont plusieurs fois évoqué le romantisme sombre de La morte amoureuse de Théophile Gautier. Mais l’on croise aussi derrière certaines trouvailles l’ombre de Jorge Luis Borges. Quant à Pouchkine, on le perçoit dans le lyrisme qui sous-tend nombre de ces récits. C’est entre ces trois influences (peut-être) : romantisme gothique, jeu borgésien, et souffle poétique russe, que se situe l’originalité de Cinquante fleurs pour te briser le cœur. Parmi ces textes auxquels le lecteur trouvera un intérêt variable selon ses goûts, il y en a un qui se distingue particulièrement : L’Enfant-fil. C’est un petit chef-d’œuvre.

Pour ma part, j’ai adoré.


D’autres avis : Elbakin, Gromovar,


  • Titre : Cinquante fleurs pour te briser le cœur
  • Autrice : GenneRose Nethercott
  • Traduction : Anne-Sylvie Homassel
  • Publication : 1 octobre 2025, Albin Michel Imaginaire
  • Couverture : Anouck Faure
  • Nombre de pages : 270 pages
  • Format : relié (22,90 €) et numérique (11,99 €)

4 réflexions sur “Cinquante fleurs pour te briser le cœur – GennaRose Nethercott

  1. AH, j’avoue que je suis à la fois attirée par la couverture, intriguée par ton retour, charmée par l’aspect poétique du recueil.
    Il y a un mais, et un gros mais.
    J’ai une tendance à être allergique aux histoires d’amour, et même ou surtout si elles se finissent mal.

    J’aime

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