Scientifiction – la physique de l’impossible – Roland Lehoucq

Alors que sort dans quelques jours le 114ème numéro de la revue Bifrost consacré à l’auteur britannique Iain M. Banks, et selon un improbable hasard du calendrier, la rubrique Scientifiction animée par Roland Lehoucq au sein de ladite revue fête ses 25,75 années d’existence, soit 103 numéros. Enfin, pas tout à fait car si les premiers articles du bon professeur se glissent discrètement dans le sommaire sommaire à partir du numéro 11 de décembre 1998, et encore, pas dans tous les numéros, ce n’est qu’à partir du numéro 38 d’avril 2005 qu’apparait officiellement la rubrique Scientifiction, soit il y a 19 ans, ou 76 numéros. Normalement, à ce stade, vous vous demandez bien où je veux en venir avec ces décomptes qui n’ont a priori aucun sens et j’avoue que moi-même, je me suis un peu perdu dans les chiffres… Et c’est bien là tout le problème ! Comment voulez-vous convertir en année-lumière la vitesse du faucon millenium lors du raid de Kessel parcouru en 12 parsecs si on n’arrive même pas à compter les articles dans une revue ? Et c’est quoi une heure lumière d’abord ? Et combien ça pèse un trou noir ?

Rassurons-nous, c’est là qu’intervient tout le talent de vulgarisateur du physicien rompu à l’exercice : pour le 10ème volume (enfin un chiffre rond !) de la collection Parallaxe, collection de vulgarisation des sciences à travers la science-fiction, dirigée par Roland Lehoucq et publiée chez le Bélial’ telle une concrétisation des efforts déployés en format court dans la revue Bifrost, le professeur a choisi de compiler 17 articles publiés dans la rubrique Scientifiction entre 2018 et aujourd’hui et de le présenter en un seul volume sous le titre : Scientifiction – La physique de l’impossible. Ces articles ont été revus et mis à jour, et organisés autour de cinq pôles qui sont autant de grandes thématiques de la science-fiction : armes et boucliers, matière et matériaux, big dumb object, physique ultime, discussion avec les anciens. Au sein de ces grandes catégories, Roland Lehoucq examine trois possibilités : les propositions plausibles, celles qui sont compatibles avec les connaissances scientifiques actuelles, les propositions spéculatives, qui ne violent pas frontalement la science mais donnent plus de liberté à l’imagination, et les propositions impossibles, et là tout part en vrille. On y parle aussi bien de rayon de la mort que de psychohistoire, ou d’antimatière et d’invisibilité. Le propos est bien sûr de faire de la vulgarisation scientifique en prenant comme support les histoires de science-fiction que nous avons tous (si vous lisez ce blog, vous vous inscrivez inévitablement dans cette généralisation), lue et aimée.

 L’idée derrière cette approche, n’est pas de dénoncer là où la science-fiction se trompe vis-à-vis des connaissances scientifiques, ou les auteurs peu scrupuleux qui s’emmêlent les pinceaux, mais de montrer comment la fiction s’empare des sciences, s’en libère, et pourquoi elle le fait et dans quels termes. Loin d’être professoral, l’ouvrage se montre tout d’abord comme le fruit d’une réflexion sur les mécanismes de la création science-fictive de la part d’un scientifique passionné de science-fiction qui reprend à son compte cette phrase d’Hal Clément dans l’article final qui complète l’ouvrage : « J’ai cherché à m’amuser, pas à travailler. » Ce qui à l’évidence n’interdit pas une certaine rigueur. Cet article conclusif est d’ailleurs très éclairant sur la question. Hal Clément y décrit le travail (impressionnant) qu’il a effectué pour proposer dans le roman Question de gravité, à la fois le regard du scientifique et celui de l’écrivain cherchant à proposer une histoire amusante pour ses lecteurs.

J’ai la fâcheuse tendance à me répéter à chaque nouvelle sortie dans la collection Parallaxe, mais une fois encore, il me faut dire à quel point ces ouvrages sont passionnants. Pour le lecteur de science-fiction comme pour l’amateur de sciences. La compilation des articles tirés de Bifrost s’adresse peut-être plus particulièrement à ceux qui ne sont pas abonnés à la revue depuis 2018, mais aussi à ses lecteurs habituels puisque qu’au-delà d’une mise à jour, elle propose un regroupement thématique qui participe pleinement à l’effort de transmission qui y est fait, et en conséquence à sa réception. Encore un excellent volume, donc.


D’autres avis : Au Pays des Cave Trolls,


  • Titre : Scientifiction – la physique de l’impossible
  • Auteur : Roland Lehoucq
  • Publication : 28 mars 2024, Le Bélial’, coll. Parallaxe
  • Nombre de pages : 320
  • Support : papier (20,90 €) et numérique (10,99 €)

5 réflexions sur “Scientifiction – la physique de l’impossible – Roland Lehoucq

  1. Je ne connaissais pas cette collection il y a encore peu de temps, et voilà qu’on m’a offert pour mon anniversaire le Dune du même R.L – Monsieur que j’ai entendu pour la 1re fois lors de la leçon du président aux utopiales dernières, et je l’avais trouvé extraordinaire.

    Bref ç’a été l’occasion pour moi de mettre mon nez dans cette collection et ohhhh, surprise ! Il y a plein de choses qui m’intéressent.

    Celui-là ne fait pas exception.

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