The Border Keeper – Kerstin Hall

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Kerstin Hall est une jeune autrice originaire de Cape Town en Afrique du Sud, et assistante éditoriale du magazine Beneath a Ceaseless Sky depuis 2016. The Border keeper, publié par l’éditeur américain Tor en Juillet 2019 est son premier roman court, une longue novella de 240 pages. Son second roman, Star eater, sera publié chez le même éditeur en 2021.

The Border Keeper est un texte qu’on peut décrire comme de la fantasy mythique en ce sens qu’il reprend les codes du mythe en les modifiant pour créer sa propre mythologie. Nous sommes ici dans l’exercice connu de la catabase, la descente aux enfers, qui est un classique des épopées grecques. Tout le monde connait le mythe d’Orphée descendu aux enfers pour retrouver Eurydice ou d’Enée qui y est allé consulter son père Anchise accompagné de la Sybille. Dante avait composé sa Divine Comédie en adaptant la catabase grecque aux mythes chrétiens. De la même manière, en écrivant The Border keeper Kerstin Hall a cherché à s’éloigner des mythes grecs pour enrichir son univers de milles autres influences qui donnent à son texte une coloration tout à fait unique. Sachez que cette palette chromatique n’est aucunement capturée par la couverture de l’édition de Tor qui en passe presque pour un ratage complet tant elle ne représente en rien le contenu du livre, voire peut éventuellement induire en erreur. En effet, l’image rendue est assez féérique alors que l’univers infernal décrit par Kerstin Hall possède la richesse à la fois exubérante et sombre du panneau droit du Jardin des délices de Jérôme Bosch. Loin du conte de fée, The Border Keeper flirte à l’occasion ouvertement avec l’horreur et il peut être préférable aux âmes sensibles de ne pas chercher à trop visualiser certains tableaux exposés. En cela, la novella de Hall me rappelle les nouvelles de Nathan Ballingrud dans le recueil horrifique Wounds.

Au bout de la voie ferrée se trouve le désert de sel et la frontière, une simple clôture, entre le monde des vivants, Ahri, et celui des morts, Mkalis. C’est là que vit la gardienne de la frontière, dans l’ancienne station du chemin de fer. Mkalis est un monde infernal, un multivers constitué de 999 royaumes où dieux et démons se livrent une guerre éternelle. Nul habitant d’Ahri n’y survivrait sans l’aide de la gardienne et les autorisations pour y pénétrer. La gardienne est une psychopompe et son âme est double. Elle vit aussi bien des deux côtés de la frontière. Elle veille à maintenir les deux mondes séparés, interdisant le passage des uns ou des autres, mais elle sert aussi parfois de guide aux vivants dans les royaumes de Mkalis. C’est la raison pour laquelle Vasethe vient la voir. Il n’y a jamais d’ailleurs qu’une seule raison pour venir la voir : un être cher est passé dans le royaume des morts et on souhaite le retrouver. Vasethe veut retrouver Raisha morte six ans auparavant. Nous sommes là de plein pied dans le mythe d’Orphée. Sauf qu’on va rapidement s’en éloigner et prendre une toute autre direction. Dès leur rencontre Vasethe donne à la gardienne le nom d’Eris, un nom qu’elle n’a pas porté depuis des centaines d’années et qu’elle souhaiterait oublier. Vasethe a aussi un passé qui va se révéler loin dans le récit. Tous deux se rendront de l’autre côté de la frontière, en Mkalis, où des forces se mettent en mouvement et des conflits se préparent, et où les lois naturelles défient celles du monde des vivants.

La qualité principale de The Border Keeper tient dans l’imagerie très forte développée par l’autrice pour construire son univers plus que dans son scénario parfois brouillon et dont la trame est moins originale, malgré de faux semblants bien exploités et un final d’ampleur mythologique. Pour une première publication, Kerstin Hall montre un talent d’écriture à la puissance évocatrice prometteuse et une imagination singulière. Le monde de Mkalis pourrait se livrer à des explorations sans fin. Un scénario plus maîtrisé aurait pu donner un livre bluffant alors qu’on reste là dans une histoire relativement convenue entre cycle de réincarnations, oubli des vies passées et reconstruction personnelle dans un monde ou dans l’autre. Une jolie découverte dans l’attente d’une plus grande histoire.


D’autres avis : Apophis, Fourbis et têtologie,


Titre : The Border Keeper
Auteur : Kerstin Hall
Publication : 16 Juillet 2019 chez Tor.com
Nombre de pages : 240
Format : papier et ebook


10 réflexions sur “The Border Keeper – Kerstin Hall

  1. Nous sommes entièrement d’accord, y compris à propos de la couverture. J’ajoute, pour avoir un peu échangé avec elle via Twitter, que l’autrice est très sympathique et d’une grande gentillesse. Je lirai avec intérêt et envie sa production à venir, c’est une certitude.

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