The last astronaut – David Wellington

last astronaut

David Wellington est un écrivain américain de romans d’horreur. Il est aussi David Chandler, l’écrivain de fantasy, et D. Nolan Clark, l’écrivain de science-fiction. C’est sous ces trois pseudonymes qu’il est connu en France pour ses romans traduits chez Bragelonne, dont notamment la récente série de space opera La longue traque (Invasion 2018, Exploration 2019). The Last Astronaut est son dernier roman, signé David Wellington, et qui relève de la SF horrifique. J’avais inscrit ce titre dans mes présélections de l’été, dans le cadre de mes lectures à l’aveugle, pour le plaisir de la découverte, quand bien même si ça passe ou ça casse, le plus souvent ça casse. Comme ici. Je n’irai pas par quatre chemins, The Last Astronaut est à classer dans la catégorie roman de gare, dans le sens péjoratif du terme, et dont la seule vertu est de pouvoir être lu rapidement. Ce que j’ai fait le temps d’un vol transatlantique. Que ce soit la faiblesse du style ou le manque d’originalité du scénario, rien ne vient gâcher l’ennui de cette lecture. Il aura fallu le confinement imposé par une carlingue pressurisée à 30000 pieds pour m’amener jusqu’à la dernière page.

Une ambition affichée pour des thèmes classiques

Un premier et court chapitre, se situant vingt et un ans avant l’action principale du roman, pose les fondations à la fois matérielles et psychologiques du récit à venir. Nous sommes en 2034 et la mission Orion 6 se dirige vers Mars. Il s’agit de la première mission habitée qui doit permettre à l’homme de laisser son empreinte dans le sol de régolite de la planète rouge. Sally Jansen est le commandant de la mission Orion 6 qui emporte quatre astronautes. A peine l’orbite de la Lune passée par le vaisseau, un grave incident à bord oblige Sally Jansen à prendre une décision critique, celle de sacrifier l’un des membres de l’équipage pour sauver le vaisseau et ses occupants. Cela marque la fin de la mission martienne, de la carrière de Jansen, mais aussi des vols habités.

Second chapitre. Dans un extrait de la préface de l’édition de 2057 de The Last Astronaut par David Wellington (sérieusement), l’auteur nous révèle l’ambition du livre, celle d’éclairer par le récit des événements de 2034 ceux de 2055 tels qu’ils vont se dérouler lors de la mission Orion 7. Et l’auteur d’annoncer bien imprudemment :

« In many ways Sally Jansen’s 2055 mission was not just an exploration of objects in space, but also a journey into the human mind. »

A journey into the human mind. Rien que ça ! Par le ton de cette critique, vous devinez que l’ambition affichée de David Wellington est à la hauteur du plantage qui s’en suit. Car à aucun moment dans ce livre ne seront explorés ni la psychologie, la conscience ou l’esprit de l’humain, ni de personne d’autre. N’est pas Peter Watts qui veut.

Vingt et un ans plus tard, en 2055, la NASA n’est plus que l’ombre de l’agence qu’elle fut et son rôle se limite à l’envoi de quelques sondes automatiques à but scientifique dans le système solaire. Son centre d’opération à Houston a été fermé et l’agence s’est réfugiée dans les locaux du Jet Propulsion Lab à Pasadena. Le programme spatial américain, mais aussi international, a été réduit à néant par l’incident de la mission Orion 6.

Sunny Stevens est astrophysicien. Il travaille pour le concurrent privée de la NASA, la compagnie internationale à dominante coréenne KSpace, jouet de son milliardaire de patron, que l’on comparera sans trop de difficultés à Elon Musk et son entreprise SpaceX. Ayant d’autres rêves que les vols spatiaux commerciaux que l’entreprise vend à de riches clients, Stevens va proposer ses services à la NASA, et révéler une découverte dont il est l’inventeur. En 2017, l’objet interstellaire 1L/2017 U1, plus connu sous le nom Oumuamua, a traversé le système solaire. De par son origine apparemment extérieure au système solaire, certains conclurent qu’il pouvait s’agir d’une sonde extraterrestre. La société KSpace a donc initié un programme de surveillance du point d’origine de cet objet, dans l’espoir d’en observer d’autres, peut-être. C’est ainsi que l’objet 2L/2054 D1 fut trouvé par Stevens. Observant sa trajectoire pendant une année, trajectoire initialement identique à celle d’Oumuamua, il s’est aperçu que non seulement 2I s’approchait de la Terre à grande vitesse, mais qu’il décélérait. Conclusion inévitable : il s’agit d’un vaisseau extraterrestre de taille phénoménale puisqu’il fait près de 80 km de long pour 10 km de large. Stevens va alors convaincre la NASA de le recruter, de monter une mission spatiale pour aller à la rencontre de l’objet et de lui réserver une place à bord. La NASA n’ayant plus de programme spatial digne de ce nom, et plus d’astronaute, son directeur va devoir aller rechercher Sally Jansen, la dernière astronaute en titre, qui depuis 21 ans s’est reconvertie dans la plongée sous-marine, pour qu’elle prenne les commandes d’une nouvelle mission à bord du dernier vaisseau de classe Orion gardé dans les entrepôts de la NASA. Pour Jansen, c’est l’occasion d’une rédemption après le désastre de la mission Orion 6. Ce dernier aspect servira de fil rouge psychologique au personnage, mais n’ira pas bien loin. L’équipage est composé de Jansen, de Stevens, de Parminder Rao, astrobiologiste et inévitablement d’un militaire, le major Windsor Hawkins, pour donner un peu de sel à l’histoire.

Le roman se saisit un moment du thème, classique en science-fiction, du Big Dumb Object, dont l’exploration par l’équipe envoyée par la NASA se fait en concurrence avec une équipe envoyée par KSpace, arrivée sur place un jour plus tôt. Les choses se passent mal dès de départ, l’équipe de KSpace ne donne plus signe de vie, et la première exploration de 2I tourne au désastre. Une seconde expédition, qui va occuper la majeure partir du roman, se transforme en premier contact, autre thème classique, lorsque la nature de 2I est révélée. C’est là aussi que le roman acquiert sa dimension horrifique. Ça grouille dans 2I.

Et là, le désastre

Tout ceci pourrait donner matière à un bon roman, me direz-vous. Les Big Dumb Objects sont une des figures classiques de la SF depuis Rendez-vous avec Rama d’Arthur C. Clarke et encore très récemment, Adrian Tchaikovsky s’y frottait dans Walking to Aldebaran, texte qui lui aussi allait titiller la SF horrifique. Mais là où Tchaikovsky proposait un roman très plaisant car il jouait de la thématique en référençant nombre d’œuvres antérieures, transformant son texte en un hommage au genre, David Wellington ne pipe mot des emprunts qu’il fait et ne livre qu’un roman sans distance ni profondeur.

C’est là par ailleurs le moindre des problèmes. Le plus important est que The Last Astronaut est mal écrit, que ce soit par le style, simplissime au possible (ah ça c’est sûr, ce n’est pas difficile à lire) ou par la construction du récit. Il semble en outre que le livre n’a pas été relu car les contradictions s’enchaînent, et les répétitions s’accumulent. Si j’étais méchant, je dirais que Wellington n’a pas une grande opinion de son lecteur moyen, et qu’il nous prend pour des cons.

Les problèmes commencent dès la première page, dans le premier chapitre. Alors qu’il devait asseoir des fondations solides, ce premier chapitre fragilise l’ensemble du récit dès ses prémices. Il est difficile de croire au déroulé des événements qui affectent la mission Orion 6. Le niveau d’impréparation des astronautes composant l’équipage n’est pas crédible. Du point de vue de la science, David Wellington s’appuie à travers le roman sur des arguments qui de loin semblent étayer un aspect vraisemblable mais qui ne résistent pas à la moindre inspection critique du lecteur. Les éléments ridicules s’accumulent au cours du récit et on frise rapidement l’overdose d’impossibilités. Je ne ferai pas ici la liste des invraisemblances ou autres stupidités qu’on trouve dans ce récit, la place manquerait.

Les personnages sont caricaturaux au possible, et la plongée promise dans les méandres de la psyché humaine est absente du roman. Les motivations de chacun, assénées au marteau piqueur ne sont pas pour autant crédibles, et les comportements individuels laissent coi. La palme revient, évidemment encore, à Hawkins dans son rôle de méchant militaire obtus. Vous aurez vu de loin venir l’antagonisme au cœur du récit : faut-il communiquer ou frapper. Si au moins, respectant l’idée de SF horrifique, il y avait quelques tensions scénaristiques propres à maintenir le lecteur sur le bord de son siège… mais non, cela non plus nous n’y aurons pas droit. Les lecteurs de SF ont depuis longtemps déjà compris la nature de 2I, et le scénario ne réserve aucune surprise. Le final, dans la résolution qu’il propose,  est un sommet d’ahurissement de type : quand on ne sait pas comment conclure, il suffit de dire que personne ne saura jamais ce qu’il s’est réellement passé.  Grande misère.

En conclusion, The Last Astronaut est un mauvais roman de SF que rien ne vient sauver de la débâcle.


D’autres avis enthousiastes : L’Albedo


Titre : The last astronaut
Auteur : David Wellington
Série : pitié, non !
Publication : 23 Juillet 2019 chez Orbit
Nombre de pages : 400
Support : ebook et papier


15 réflexions sur “The last astronaut – David Wellington

  1. Les non-conclusions dans un roman, ça m’énerve presque autant qu’un morceau de musique qui n’a pas de fin autre, sur un album, que le fait de baisser progressivement le volume. Merci pour ta critique salutaire !

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  2. finalement, ma moitié me l’a acheté pour me faire plaisir et me faire une surprise. Je l’ai fini…. aujourd' »hi avec peine.
    Je pense que j’étais quand même un peu influencé et donc cela été une épreuve, je dois dire que je partage entièrement ton avis. Je me demande si je publie du coup ma chronique?….. LOL

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