Last Tango in Cyberspace – Steven Kotler

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Last Tango in Cyberspace est le premier livre de science-fiction de Steven Kotler, journaliste et auteur d’essais sur le potentiel et les performances de l’esprit humain, ainsi que sur l’innovation technologique. Kotler propose un univers cyberpunk dans un futur très proche, 5 à 10 ans tout au plus. Le roman effleure des thématiques intéressantes comme l’écologie, la cause animale, l’empathie, le développement des courants de sous-cultures à l’échelle mondiale. Il contient quelques bonnes idées et montre une certaine qualité d’écriture. Mais ses quelques qualités sont mal ou peu mises à profit dans un scénario faible et une histoire qui ne mène nulle part.

On y suit Judah « Lion » Zorn, un empathe (em-tracker dans le roman) recruté par le patron milliardaire de la compagnie Artic, dont les activités restent assez troubles, pour enquêter sur la mort d’un chasseur de gros gibier.

Il n’y a pas vraiment d’enquête. Le personnage de Lion est inutile dans le scénario. Il ne va rien découvrir par lui-même, ne va pas apporter de solution, ni avoir d’influence sur les événements. Le livre fait 336 pages et il faut attendre la page 257 pour qu’il s’y passe enfin quelque chose. Lion est baladé de New York à San Francisco, au Nouveau Mexique puis à Kuala Lumpur. Son occupation principale consiste à absorber de grandes quantités de drogues et d’alcool. Voilà, fin de l’histoire. Le puzzle qui se met en place est grossier et le lecteur comprend bien plus rapidement que le personnage principal le fond de l’histoire. Il faut dire qu’il n’absorbe pas les mêmes quantités de drogues. Enfin, je parle pour moi, vous, je ne sais pas. Pour couronner le tout, le roman aligne les clichés, parfois complètement ridicules, par wagons entiers. Florilège :

  • La secrétaire qui accompagne Lion est en fait une spécialiste du combat à mains nues capable de sauter par-dessus un comptoir et de désarmer deux tueurs professionnels avant qu’ils ne réagissent. Ils passent évidemment des journées entières à baiser.
  • Les membres du groupuscule si secret qu’il passe pour une légende ont tous un tatouage bien visible sur la nuque qui les identifie comme appartenant à ce groupuscule si secret qu’il…
  • On vous sert évidemment de gros joints à bord des avions de la compagnie Air Jamaica.
  • Le milliardaire qui dépense sa fortune à essayer de mettre la main sur la drogue est convaincu en une phrase qu’il ne faut pas le faire lorsque Lion lui dit que « c’est mal». « D’accord, vous m’avez convaincu ». J’en suis tombé de mon canapé.

Lion est décrit comme un ancien journaliste inspiré par le Nouveau Journalisme d’Hunter S. Thomson. Le roman est lui-même fortement inspiré par Fear and Loathing in Las Vegas. Mais nous ne sommes plus en 1971, et on a bien du mal à penser que Kotler fait une capture subtile du Zeitgeist de ce futur proche. Alors que la spécialité de Lion, en tant qu’empathe, est de savoir repérer les courants culturels et de prédire les nouvelles tendances qui vont se muer en sous-cultures, le roman repose en grande partie sur l’utilisation de mèmes culturels quelque peu datés. Ainsi, Lion et son meilleur ami communiquent entièrement par citations d’Apocalypse Now. Lion a toujours sur lui une copie de Dune. Le leader du groupuscule secret qui développe la drogue de l’empathie s’appelle Muad’Dib. Ses gardes du corps sont les Bene Gesserit. La drogue en question s’appelle Sietch Tabr. Dans son roman Steven Kotler cite aussi abondamment Blade Runner, William Gibson, etc. Nouvelles tendances dites vous ? William Gibson, lui,  inventait le mot cyberspace en 1982, bien avant l’invention du web. Steven Kotler, lui, recycle et n’invente rien.

Enfin, la thématique de la cause animale qui aurait pu porter le roman n’est en fait qu’effleurée et se limite au fait que Lion ressente la tristesse de la vache quand il croise une paire de botte en cuir. Elle est résolue sur l’idée que les chasseurs d’espèces protégées vont se suicider s’ils absorbent la drogue car ils vont ressentir de l’empathie pour leurs victimes.

C’est faible, très faible, et cela ne fait pas un bon roman.


Titre : Last tango in Cyberspace
Auteur : Steven Kotler
Éditeur : St. Martin’s Press (14 mai 2019)
Langue : anglais
Nombre de pages : 336
Format : papier et ebook


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