The Causal Angel (Jean Le Flambeur 3/3) – Hannu Rajaniemi

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Troisième et dernier volume de la série Jean Le Flambeur d’Hannu Rajaniemi, The Causal Angel tient les promesses des deux premiers volumes et plus encore. The Quantum Thief avait plongé le lecteur dans un univers très éloigné de notre réalité contemporaine et qui s’il se montrait difficile d’accès, n’en était pas moins étourdissant par la richesse des idées et du sense of wonder qu’il proposait. The Fractal Prince allait plus loin encore et dessinait les contours d’une histoire plus vaste qu’on pouvait l’imaginer dans le premier volume. De nombreuses questions subsistaient toutefois, d’une part parce qu’on n’avait pas forcément tout compris (c’est un euphémisme) et d’autre part parce que de nombreux éléments nous manquaient.  The causal Angel répond à tout, ne laisse aucune pierre non retournée,  et résout tous les arcs. C’est simple, carré, efficace. La parfaite conclusion d’une trilogie exigeante, en d’autres termes.

La forme show, don’t tell reste sous bien des aspects de rigueur, mais en ce qui concerne l’histoire, Hannu Rajaniemi n’hésite plus à lâcher des informations et à expliquer qui sont les protagonistes, et comment l’humanité en est arrivée là. Pour ce faire, il emploie de nombreux flashbacks, soit sur des événements qui se sont déroulés avant le début de la trilogie, soit sur des scènes vues précédemment d’un point de vue différent. Si dans The Quantum Prince, Jean le Flambeur était à la recherche de sa mémoire perdue, un des thèmes de The Causal Angel est non seulement la perte de la mémoire collective,  à l’échelle de l’humanité, mais aussi de la réécriture de l’Histoire. De nombreux personnages reviennent en scène, même si parfois brièvement, et contribuent à nous révéler les tenants et les aboutissants du récit. De nouveaux personnages font aussi leur apparition, et pas des moindres. Certains sont assez hauts en couleur. Dans ce dernier chapitre, le Sobornost et les Zokus entrent dans une guerre ouverte qui va laisser des traces dans le système solaire (c’est là aussi un euphémisme). Deux visions du monde s’affrontent, celle du Sobornost qui veut échapper aux lois de l’univers et celle du Zoku qui embrasse sa réalité quantique. C’est aussi l’affrontement d’une humanité individualisée et immortelle mais esclave des dieux fondateurs contre celle d’un collectif d’esprits intriqués ou l’individu n’a plus de sens. Si nous avions déjà fait connaissance avec le Sobornost dans les volumes précédents, celui-ci nous offre une plongée fascinante dans le monde des Zokus. A l’instar des cités d’Oubliette dans The Quantum Thief, ou de Sirr dans The Fractal Prince, c’est ici le collectif Zoku qui s’offre à explorer.

Causality. It’s a lens through which we see things. An ordering of events. In a quantum spacetime, it is not unique. It’s just one story among many.

Du point de vue de la structure, l’alternance des chapitres nous fait suivre le devenir de trois personnages suivant trois arcs narratifs. L’histoire reprend directement là où The Fractal Prince l’avait laissée. Je livre inévitablement ci-dessous quelques spoilers mais très légers. Vous y survivrez, je n’entre pas dans les détails qui font tout le charme de la trilogie. Prenez cela pour des teasers.

Le voleur

I should have let my other self tell me his plan. Mental note: never interrupt a villain who is monologuing.

Jean s’est échappé de la Terre et du désastre engendré par l’attaque des dragons du Sobornost en emportant avec lui la version enfant de Matjek Chen, et une copie complète de… enfin, vous verrez. Débarrassé de Joséphine Pellegrini, il va tout faire pour retrouver Mieli et élaborer des plans dans des plans pour arriver à ses fins. Il devra faire appel à d’autres de ses nombreuses personnalités et exploiter au maximum ses talents. Mais il risque d’être rapidement dépassé par les événements qui embrasent le système solaire.

La guerrière

You grip the katana lightly, like a calligrapher’s brush, and prepare to write a haiku of death.

Après avoir combattu seule une armée dans le désert du wildcode, Mieli est séparée de Jean et de son vaisseau le Perhonen. Elle est récupérée par un vaisseau Zoku. Ceux-ci tentent alors de l’inclure au collectif et au sein du Great Game. Elle va jouer le jeu et révéler, à elle même, une nature différente de celle de la petite mais dangereuse guerrière Oortienne qu’on lui connaissait jusqu’alors. Mieli est pour moi le personnage le plus attachant de la trilogie, et aussi sans doute le plus important.

La déesse

Alone on the timeless beach, Joséphine Pellegrini finds herself disappointed by the end of the world.

Joséphine Pellegrini est elle aussi captive. Cherchant à regrouper les fondateurs en leur donnant un ennemi commun, elle va devoir affronter leur pire cauchemar à tous : le glitch de programmation All-D. En très grande partie responsable du chaos qui saisit l’univers, c’est elle qui va nous livrer les éléments  de l’Histoire.

Tabula rasa

The Causal Angel  se révèle être le tome le plus facile d’accès de la série. On s’est habitué aux néologismes, ou pas, mais peu importe, l’histoire elle nous est contée. Bien que l’utilisation de flashbacks pour expliquer le fond de l’histoire pourrait faire imaginer le contraire, The Causal Angel est avant tout un roman entièrement basé sur l’action. Et lorsque Hannu Rajaniemi laisse parler ses penchants destructeurs, il n’y va pas de main morte. Le récit se déroule à la vitesse de la lumière, et c’est un véritable feu d’artifice (si vous me permettez cette image élimée) qui emporte le lecteur de la première page à la dernière. Son autre qualité est de fournir une véritable conclusion à son histoire, et au lecteur une lecture satisfaisante en tout point.

Au final, je referme la trilogie avec le sentiment qu’Hannu Rajaniemi a écrit une nouvelle page de la SF, qu’il est allé seul, courageusement, voir ce qu’il y a de l’autre côté de la frontière que personne n’avait osé franchir jusqu’ici et qu’il en est revenu, un peu perturbé, avec ce manuscrit entre les mains, un peu comme un personnage de Lovecraft qui aurait visité R’leyh. Hautement créative, la trilogie de Rajaniemi est un grand roman de SF, hors norme, difficile, mais tellement gratifiant.


Voir aussi la critique de Gromovar, Stéphane Gallay sur Blog à Part,


Livre : The Causal Angel
Série : Jean le Flambeur (3/3)
Auteur : Hannu Rajaniemi
Publication : 2014
Langue : Anglais
Traduction : Non, Bragelonne ayant jeté l’éponge après le premier tome
Nombre de pages : 304
Format : papier et ebook


3 réflexions sur “The Causal Angel (Jean Le Flambeur 3/3) – Hannu Rajaniemi

  1. Il faut vraiment que je me mette plus sérieusement à Rajaniemi, moi. Le souci c’est qu’il faut que je me mette plus sérieusement à 758 autres auteurs également 😀 Merci pour ton excellente critique en tout cas, elle donne envie !

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