Time was (Le temps fut) – Ian McDonald

Time was

Ian McDonald est un auteur britannique, né à Manchester, principalement connu en France pour les romans Le fleuve des Dieux (Denoël, 2010) et La maison des Derviches (Denöel, 2012) ainsi que les deux premiers tomes de la série Luna publiés  en 2017 et 2018 par Denoël dans la collection Lunes d’Encre. Le troisième tome sortira en fin d’année 2019 dans la même collection. Au delà de ces romans, l’auteur a aussi publié de nombreuses nouvelles de SF.

Sa toute dernière production est publiée par Tor ce 24 Avril. Il s’agit d’un roman court (144 pages), sorti sous le titre Time Was. Je signale que cette novella a reçu des avis assez négatifs de la part des lecteurs l’ayant obtenue en avant première sur Goodreads, car ceux-ci croyaient, ou espéraient, lire une romance gay. Ils furent déçus. Il faut dire que Tor avait fait la promotion du livre avec le chapeau « A Queer Love Story Across Time ».

Time was est avant tout un roman de science-fiction sur le thème du voyage dans le temps. Emmett Leigh est un bouquiniste indépendant, qui cherche et vend sur Ebay des livres à valeur historique. Lors de la liquidation de la librairie The Golden Page du quartier de Londres Spitalfields, il dégote un petit livre de poésies. Ce ne sont pas les poésies, par ailleurs assez mauvaises, qui l’intéressent mais la lettre manuscrite glissée entre les pages. Lorsqu’une histoire personnelle peut être associée à un livre, celui-ci prend immédiatement de la valeur sur le marché des passionnés d’Histoire. La lettre en question est une lettre d’amour, écrite par Tom pendant la guerre à son amant Ben.

A love letter. Every war is a profound sexual revolution. Social mores are upset, norms overturned.

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Photographie d’époque de la seconde bataille d’El Alamein 1942. S’agit il de Tom et Ben ?

Grâce à quelques éléments glissés dans la lettre, il arrive à dater son écriture lors de la seconde bataille d’El Alamein opposant les Britanniques aux Allemands en 1942 en Egypte. (On peut s’amuser au cours de sa lecture à rechercher les événements réels et les dates mentionnés dans le livre). Intrigué, il va chercher à identifier Tom et Ben. Il lance alors des appels sur internet, chez les bibliophiles et les passionnés d’Histoire. Il reçoit une réponse. Une certaine Thorm Hildreth a dans les vieux papiers de son grand-père une photographie et un témoignage écrit qui pourraient bien identifier les deux hommes au Caire en 1941. Tom Chappell et Ben Seligman. Avec cette information capitale, Emmett va chercher à reconstituer leur histoire. Tom Chappell  était un jeune poète et Ben Seligman un professeur de physique employé par l’armée britannique dans les recherches  sur le RADAR. Puis l’impossible va se révéler à Emmett. Il identifie à nouveau Tom et Ben sur des photos prises à diverses époques, jusque dans un reportage en pleine guerre de Bosnie en 1993. Il doit se rendre à l’évidence, les deux amants sont des voyageurs du temps.

Were they researchers from the future? Were they refugees? Were they visiting and returning, time and again? Were they time lost, unable to go home? Had there been an incident at the Department of Time Travel?

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La Tour Martello de Shingle Street où se déroule une partie des événements.

Dans cette enquête sur l’identité de deux hommes à partir d’une simple lettre trouvée dans un livre, Ian McDonald arrive à créer un récit très prenant, mêlant faits et lieux historiques, voire rumeurs et théories complotistes. Clairement, Ian McDonald a fait beaucoup de recherches pour étayer son roman. Les légendes autour de la mer en feu à Shingle Street et des corps rejetés par la mer, par exemple, sont bien réelles ! On se prend rapidement en tant que lecteur à aller chercher les informations sur internet pour replacer l’histoire de Tom et Ben dans notre Histoire.  Ce n’est peut-être pas le traitement le plus original qu’on puisse imaginer sur le voyage temporel, mais c’est bien mené, très plaisant à lire, et par ailleurs très bien écrit. Le récit alterne le point de vue d’Emmett et les pages du journal de Tom, permettant ainsi à l’histoire de se construire lentement tout au long du livre. Le twist final, car il y a un twist, je ne l’avais pas vu venir et il est très satisfaisant.

D’un point de vue science-fictif, Ian McDonald parle bien de mécanique quantique, de principe d’incertitude, et on assistera à l’expérience originelle qui provoque l’histoire du livre, mais il n’alourdit pas inutilement un récit qui n’a pas besoin de détails scientifiques pour tenir la route.

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En conclusion : Time was est un très beau roman sur le voyage dans le temps. Les personnages sont séduisants, et l’histoire est bonne. Il est évident que ce texte va décrocher des prix, et je dirais même que ça sent l’adaptation au cinéma à plein nez. En tout cas, cela ferait un bon scénario. De même, les chances de traduction sont très élevées. J’imagine que des éditeurs français doivent déjà avoir le regard dessus.

En tout cas, moi j’ai beaucoup aimé, et je ne suis pas le seul puisque la novella a reçu le prix BSFA award de la meilleure novella de l’année le 20 Avril 2019.

Les éditions Le Bélial’ publieront le 13 février 2020 la traduction de ce texte en français sous le titre Le Temps Fut dans la collection Une Heure Lumière. Traduction de Gilles Goullet, illustration de couverture d’Aurélien Police.

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D’autres avis :  Gromovar sur la VO, et sur la VF : Apophis, Un papillon sur la Lune, Dionysos, Artemus Dada, Les lectures du Maki, Canal hurlant, Xapur, Au pays des Cave Trolls, De livres en livres, Yossarian, Le Monde d’Elhyandra,


Livre : Time was (Le temps fut)
Auteur : Ian McDonald
Publication : 2018 chez Tor
Traduction : Gilles Goullet chez Le Bélial’, février 2020
Langue : Anglais
Nombre de pages : 144
Format : papier et ebook

Chez le Bélial’: Le temps fut


20 réflexions sur “Time was (Le temps fut) – Ian McDonald

  1. Merci pour cette découverte en avant-première ! Pour la collection Lunes d’Encre le format est peut-être un peu court ?
    En tout cas, j’ai hâte de lire l’auteur (que j’affectionne tout particulièrement) sur un registre où je ne l’attendais pas.

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  2. Merci, c’est ajouté à ma (longue) liste 🙂 Un auteur que j’apprécie pas mal
    La maison des Derviches est un bon roman (soft sf quand même) et la série Luna est incontournable !

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  3. Ah je peux comprendre que faire la promotion autour d’une romance gay n’est pas l’argument le plus judicieux qui soit. Preuve en est, elle m’a semblée annexe (ça tombe bien, je n’aime pas vraiment les romances). Je suis d’accord avec toi sur le traitement du voyage temporel qui est plutôt commun. J’ai tout de même passé un bon moment avec ce récit.

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